En date du 2 décembre 2012

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

LE GOÛT DE VIVRE ET DE SURVIVRE

Lorsqu’on est victime d’actes criminels, comment peut-on y survivre?

Est-ce possible de retrouver le goût de vivre?

Il y a plein de belles phrases toutes faites qui parlent du temps qui arrange les choses, une journée à la fois, une seconde à la fois… des forces insoupçonnées qui résident en chacun de nous, de la lumière au bout du tunnel…

Moi, tout ce que je sais, donc tout ce que je peux vous en dire, c’est que je suis encore là. J’existe, maintenant. Si je meurs, ma vie sera finie. Alors… par simple curiosité, j’ai bien envie de voir jusqu’où je peux mener ma vie.

Par contre dans le passé, j’ai fait de nombreuses tentatives de suicide, de l’âge de vingt ans à trente quatre ans. Quatorze années de misère et de grosse noirceur.

Avant l’âge de vingt ans, je survivais. Ce qui m’a tenue en vie à cette époque, c’est que j’ignorais que tout ce que je vivais était anormal. J’étais conditionnée à la peur, à force de vivre régulièrement de la violence excessive.

Maintenant, depuis déjà dix années, j’ai décidé de me tenir debout coûte que coûte afin de toujours choisir ce qui est bien… et de ne jamais hésiter à mettre un bon frein à tout ce qui est mal. À cause de mon enfance malsaine, la majorité de ma vie a été gâchée alors je n’ai plus de temps à perdre. Dire que je me sens bien en vie, ça serait d’exagérer un peu mais je sens au moins que je ne suis pas tout à fait morte. Heureuse? Malheureuse? Ça dépend des jours, puisque j’ai accepté dorénavant de vivre les deux.

Mais selon moi, je ne suis pas le meilleur exemple à suivre. Je le dis tout simplement, car je n’écris pas ce chapitre en voulait faire croire que j’ai enfin trouvé un coffre aux trésors.

Par contre, lorsqu’on atteint une certaine paix, on peut certainement faire un petit bilan de nos erreurs et de nos réussites, et si notre histoire révèle qu’on a réussi à survivre à de très grosses embûches, peut-être qu’il devient très important de partager toutes les solutions qu’on a trouvé afin que d’autres puissent se sortir des mêmes noirceurs, si possible plus rapidement que nous. J’écris également ce chapitre pour redonner un peu de courage à ceux qui en auraient besoin, et sûrement aussi, afin de ne pas perdre tout le mien…

De un, il faut que ce soit très clair qu’une victime, c’est aussi un jeune homme petit et chétif ou un homme grand et musclé, car il n’y a pas que les femmes qui sont victimes d’actes criminels. Je dis cela car je suis toujours attristée et troublée de constater que les statistiques démontrent que beaucoup plus d’hommes que de femmes se suicident au Québec. Et à voir tout ce que j’ai enduré en tant que femme, qui est pourtant en jargon populaire le soit disant « sexe faible », j’ai peine à imaginer ce que les criminels peuvent avoir l’idée de faire endurer… au « sexe fort ». Cela m’attriste énormément.

De deux, il faut savoir que ce qui importe le plus pour retrouver le goût de vivre, c’est d’apprendre à distinguer l’énorme différence entre le bien et le mal. Ça selon moi, ce sont deux éléments dont la valeur est identique et constante pour tous les êtres humains, homme ou femme, riche ou pauvre et à travers le monde entier. Peu importe d’où on vient et notre vécu, le jour où nous prenons conscience en nous-mêmes de cette réalité, notre équilibre commence déjà à se rétablir. On peut enfin réaliser que les horreurs qu’on nous a fait vivre, nous n’en sommes certainement pas responsables ni coupables et on peut alors se départir enfin de cet énorme fardeau. Par le fait même, le bien que nous pouvons nous faire à nous-mêmes devient aussi clairement visualisable et possible. Nos batailles ne nous semblent plus vaines, et nous pouvons dorénavant vivre des moments de paix sans ressentir tout le poids du monde sur nos épaules.

En résumé, je crois que le bien, c’est tout ce qui nous rend heureux, équilibré, humain et en vie. Le mal, c’est ce qui nous amène à être malheureux, déséquilibré, inhumain et mort.

Notez que c’est très important de bien faire la distinction entre les êtres « humains » et « inhumains », au lieu de parler de « nature humaine » lorsque tout va de travers. Si le but final est flou et mêlé, le processus pour faire de bons choix de vie sera lui aussi flou et mêlé.

Tout au long de notre vie, nous avons l’opportunité de faire des choix dans un sens comme dans l’autre : le bien ou le mal. Cependant, je crois qu’il est totalement faux et très naïf de penser que « nous avons toujours le choix ». Premièrement, la race humaine est une des rares espèces de cette terre qui exige autant d’années d’apprentissage avant de devenir « autonome ». On ne peut donc carrément pas survivre seul dans les premières années de notre vie et ceux qui nous éduquent deviennent nos propres modèles. Deuxièmement, enfant ou adulte, on peut vite devenir à la merci d’une arme ou de toute force supérieure à la nôtre.

À la naissance, les êtres humains ne naissent pas tous dans des familles saines et équilibrées. En fait, je crois que les familles « parfaites » sont très rares. Ce qui est encore plus grave, c’est qu’il existe aussi quelques familles extrêmement malsaines et vraiment déséquilibrées. On comprend vite que certains enfants sont bien plus en danger que d’autres et que s’ils survivent jusqu’à l’âge adulte, ils auront le lourd fardeau de… devoir recommencer complètement leur vie, car ils ont imité de mauvais modèles. Parfois, il se peut même que toutes leurs valeurs personnelles soient à changer, puisque leur distinction entre le bien et le mal étaient totalement faussées dès le départ, et de manière très significative.

Globalement, je crois aussi que certains continents, pays, villes, villages ou cultures, sont plus avantagés ou désavantagées que d’autres à l’heure actuelle au niveau de leur équilibre entre les êtres humains et inhumains. Le point rassurant, c’est que plus la communication planétaire sera à la fine pointe, autant au niveau technique que diplomatique, plus l’équilibre sera possible. Il ne faut jamais oublier que la principale faculté qu’ont tous les êtres humains, depuis la nuit des temps, c’est de vouloir toujours tout « imiter ». Heureusement, cela fonctionne autant dans un sens comme dans l’autre. Lorsque des armes très destructrices sont découvertes, on est tous au courant que… tout le monde en veut. Mais lorsque des « miracles » se produisent, c’est bien évident que tout le monde en veut aussi.

Un miracle pour moi, c’est quelque chose qui me semblait impossible et irréalisable au point de départ mais qui tout à coup, devient tout à fait possible et réalisable. Larousse dit que c’est un « effet dont la cause échappe à la raison de l’homme et dans lequel on voit un signe du surnaturel. » Surnaturel : « qui dépasse les forces ou les lois de la nature ». Nature : « réalité physique existant indépendamment de l’homme ».

Je vous jure que jamais je n’aurais pensé m’en sortir un jour et être encore en vie en ce moment même. Avoir le goût de vivre et de sourire, en cet instant, c’est pour moi : un vrai miracle.

J’avoue que ça me déplait au plus haut point de devoir me replonger dans mon passé tordu. Mais je vais faire un petit effort pour vous raconter un peu de ma vie, au cas où cela pourrait aider même juste une seule personne sur cette terre.

Auparavant, j’aimerais ajouter que je suis enseignante depuis plus de vingt ans. J’enseigne en cours privés, ce qui me donne accès à tout plein de gens, enfants et adultes. Je crois qu’à cause de mon passé chaotique, j’ai développé un sixième sens pour diagnostiquer tout ce qui ne va pas. Alors il m’est souvent arrivé de ressentir la détresse des autres et maintenant, lorsque je le perçois et qu’une personne m’avoue qu’elle est suicidaire, je lui pose d’abord cette question :

Dis-moi qui a toujours été là, avec toi, depuis le début de ta vie, à chaque jour et à chaque seconde? Dans les petits plaisirs comme dans les grosses misères?

On me répond généralement : ma mère, mon père, ma sœur, mon frère, mon oncle, ma cousine, mon ami, ma femme, mon mari… et aussi très souvent : personne. Personne n’a toujours été là pour moi.

Je comprends bien que toutes ces réponses sont vraies. Mais moi, ce que je désire vous faire dire, c’est : Toi. Toi tu y étais.

Chaque fois, on réagit en riant et en me trouvant un peu… nouille. Mais on comprend vite où je veux en venir.

Certaines personnes ont des grosses familles, des tas d’amis, des vies hyper remplies et beaucoup de chance. Mais… au-delà des apparences, on est tous fragiles et personne n’est à l’abri des peines. Et ça ne veut jamais dire que la plus belle des histoires est nécessairement… la plus intéressante de toutes.

Ce que je veux dire, c’est que même si personne n’a toujours été là pour nous, ce n’est pas la fin du monde. Ce qu’il ne faut jamais oublier, c’est que notre histoire, à chacun de nous, est très importante. Chaque personne existe, depuis sa naissance, en parcourant un chemin qui lui appartient. Mais même si au départ, on n’a pas pu choisir d’où on vient, on peut un jour choisir : QUI ON DEVIENT.

Suite à cette constatation, une autre évidence est celle-ci : je crois que lorsqu’on a vécu de grosses peines, on apprend très vite à se satisfaire de petites joies. Ça devient même rapidement… des gros cadeaux. Alors… un beau jour, si on tient bon, « la chance » a de fortes chances… de nous sourire également.

Personnellement, si j’ai fait des tentatives de suicide dès l’âge de 20 ans, c’est qu’il y avait une profonde tristesse accumulée en moi et surtout, une incompréhension totale du sens de cette vie. Le néant total. Oui, je sais, ce sont pourtant supposées être « nos plus belles années».

À 20 ans, j’avais très peur de consulter un psychologue puisque… j’avais peur qu’on me traite à nouveau de «folle ». Toute ma vie, mon géniteur cauchemar m’a encensée de « maudite haïssable », alors je craignais de lui donner raison. Tous les agresseurs et abuseurs que j’ai connus utilisent d’ailleurs ces termes à toutes les sauces pour nous rabaisser et avoir encore plus d’emprise sur nous, surtout chaque fois qu’on ose parler et tenter de se défendre contrer eux.

Le 18 novembre 2001 (j’avais 35 ans), j’ai trouvé le courage d’appeler à suicide secours (Centre 24/7 de Gatineau : 819-595-9999). Je savais que sinon, cette fois-ci, je ne me raterais pas. Mais par chance, une élève m’avait parlé de ses problèmes personnels en mentionnant cette ligne d’aide. Également, un ami que j’estimais énormément m’a beaucoup éclairée. Un homme de 6 pieds 2, 240 livres de muscles, joueur de Hockey professionnel, qui a les moyens de se balader avec des véhicules tirés tout droit des films de James Bond, mais… qui ose dire haut et fort (même à la télévision) qu’il a eu besoin d’un psychologue pour retrouver le sens de sa vie

Waow. Quel bon exemple d’homme. Alors je me suis dit… si un homme de cette envergure admet qu’il est fragile et blessé, pourquoi moi je ne parviendrais pas à me l’admettre en tant que femme?

En fait, ces deux personnes m’ont sauvé la vie. Si un jour elles lisent ces lignes, je suis certaine qu’elles se reconnaîtront… alors je tiens à leur adresser personnellement toute ma reconnaissance.

Ce ne sont pas les « fous » qui vont consulter un psychologue afin d’avoir quelques outils de plus pour survivre aux peines. Je pense plutôt que les vrais fous sont bien trop orgueilleux pour demander de l’aide à de vrais spécialistes… et se lanceront plutôt dans toutes sortes de foires-spirituelles-bonbons afin de réussir à justifier leurs tendances tordues et leurs passions envers tous les vices imaginables et inimaginables. Mais souvenez-vous qu’il n’est jamais trop tard pour bien faire…

Finalement, pour tous ceux qui ne comprennent pas le suicide et qui m’ont trop souvent jugée sévèrement, j’expliquerais cela ainsi par cet exemple: on n’accusera jamais un grand brûlé de mourir. Toutes les cellules de sa peau ne peuvent plus respirer et c’est la mort qui s’ensuit en conséquence de ses blessures physiques.

Lorsqu’on subit de grosses peines, c’est un peu la même chose au niveau de notre mental. Toutes les parties infimes de notre pensée se retrouvent noircies et submergées par une réelle obscurité. À force d’avoir mal, jour après jour, nuit après nuit, seconde après seconde, la douleur devient intolérable. On en vient même à avoir de la difficulté à respirer physiquement… on se met à pleurer n’importe où et n’importe quand… on ne peut plus fonctionner normalement en société… on ne peut plus compter sur soi-même… alors on s’isole de plus en plus.

Parallèlement à cette souffrance insupportable, si on craint de demander de l’aide à un vrai spécialiste, on devient complètement seul et très vulnérable. Je sais que tous ceux qui se sont un jour rendus à ce point de non retour savent de quoi je parle. C’est un véritable enfer.

Moi, tout ce que je voulais, c’était de ne plus ressentir ce mal atroce. Et j’étais persuadée que personne ne pourrait jamais me secourir dans cette obscurité totale, puisque personne de mon entourage ne m’avait jamais « vue » dans toute cette noirceur. Je me sentais totalement incomprise, depuis le tout début de ma vie.

La plupart des gens me disaient : « de quoi te plains-tu, tu as tout pour être heureuse! » Pourtant, il me manquait l’essentiel.

Cauchemar avait souvent l’habitude de me répéter quand ça lui adonnait bien : as-tu vu comment le beau soleil brille? Mais comment est-ce que j’aurais bien pu le voir, le beau soleil…

 

 

MON HISTOIRE

Je suis née dans un petit village du Québec le 29 septembre 1966. Déjà avant ma naissance, ma mère m’a raconté que mon géniteur cauchemar la maltraitait. Il était déjà très impatient, tapait dans les murs, claquait les portes, donnait des coups de pieds tout près d’elle et des coups de poings dans les portes et sur les meubles, faisait spiner ses pneus de voiture en partant à toute vitesse à tout moment et conduisait dangereusement. Tout cela a bien sûr continué après ma naissance.

Cauchemar ne se gênait pas non plus pour lui donner des bonnes claques puisque sa patience était toujours à zéro. Peu après ma naissance, il lui a aussi asséné un coup de planche sur un genou et ma mère a eu du mal à marcher pendant des semaines.

COMPRENEZ BIEN QUE LORSQUE QUELQU’UN NOUS A DÉJÀ FRAPPÉS DE MANIÈRE IMPRÉVISIBLE, IL EST IMPOSSIBLE PAR LA SUITE DE RESTER INDIFFÉRENT À LA MOINDRE PETITE MANIFESTATION DE VIOLENCE DE SA PART. NOTRE SANG SE GLACE À LA SECONDE. J’ai écrit cela en gros, spécialement pour certains intervenants de notre système judiciaire qui n’ont aucune once de logique.

Cauchemar était très fort avec de très grosses mains. En construisant des maisons, j’ai vu de mes propres yeux que si le deux par quatre n’entrait pas dans la cloison, cauchemar n’allait jamais chercher un marteau. Il lui suffisait de donner une claque dessus avec la paume de sa main. J’ai aussi les photos d’une porte en bois franc brisée totalement en deux que cauchemar a dit aux enquêteurs avoir « poussée ». Cette porte est défoncée de haut en bas. Ce serait donc faux de croire que cauchemar ne connaissait pas sa force. Je crois qu’il savait très bien à quel point il était puissant, mais qu’il adorait semer la terreur.

Avant ma naissance, ma mère avait une petite chienne papillon nommée « Finette ». Cauchemar la trouvait bien sûr très fatigante et il l’a un jour lancé dehors, du haut d’une fenêtre, rien de moins. La petite chienne a boité pendant des semaines.

Malheureusement, ma mère a aussi connu une famille dysfonctionnelle. Son enfance à elle aussi a été très malsaine et violente, puisqu’elle conserve même les cicatrices sur le bas du dos au côté droit… d’une empreinte de fourche. Oui, vous avez bien compris. Quatre dents de fourche comme on voit sur les images représentant le diable en personne, puisque lorsqu’elle avait environ onze ans, elle riait avec son jeune frère pour s’amuser dans le foin. Mais son père les trouvait tous les deux insupportables au point de lui donner envie de tuer sa propre fille unique en l’empalant avec une fourche.

Ma mère était donc habituée de ne pas être aimée véritablement, à ne pas savoir que la violence excessive était anormale, et en plus de cela, elle avait un sens moral beaucoup trop au dessus de la normale. Ce que je veux dire par là, c’est qu’elle avait le profond désir d’être parfaite, alors elle a tout cru ce que les curés disaient. C’est vite devenu une sainte martyre. Elle s’est marié une seule fois, et elle désirait demeurer avec son mari, dans le bonheur comme dans le malheur, à la vie… à la mort. En effet, la mort n’était jamais bien loin…

Ma mère était vraiment excellente à l’école mais en 1951 lorsqu’elle a eu terminé sa septième année à l’âge de 13 ans, sa famille était beaucoup trop pauvre pour lui faire poursuivre des études supérieures qui n’étaient pas gratuites à cette époque. Son père lui a répété à plusieurs reprises qu’elle n’était bonne que pour « manger et (…) ». Pourtant, elle accomplissait les nombreuses tâches de la maison avec sa mère, mais il était beaucoup plus payant dans ces temps là d’être un homme. Elle n’a jamais appris à conduire, cela n’étant réservé que pour ses trois frères. Elle s’est mariée avec cauchemar à l’âge de 21 ans en 1958.

Mes parents voulaient des enfants mais les grossesses ont semblé impossibles pendant de nombreuses années. Ils ont alors adopté ma grande sœur, et ma mère est ensuite tombée immédiatement enceinte de moi. Ça lui faisait tout à coup deux enfants à s’occuper. Bien sûr, cauchemar n’a jamais accompli la moindre tâche ménagère dans une maison. Il ne déposait même pas son linge salle dans le panier. Alors quelques semaines après ma naissance, à cause de toute la fatigue accumulée et sûrement aussi, toutes les séquelles du stress qu’elle vivait depuis sa propre naissance, ma mère a eu un syndrome post-partum. Le médecin lui a donc conseillé de se reposer pendant au moins une semaine.

Ainsi, cauchemar a eu ma garde pendant quelques nuits lorsque j’avais environ un mois, mais ma mère s’est vite rendu compte qu’il me donnait du lait de vache au lieu du mélange pour les bébés et elle a dû abréger sa convalescence. Heureusement pour moi.

À son retour près de moi, elle a immédiatement réalisé que le comportement de son bébé avait changé. Aussitôt qu’elle m’approchait, je me mettais à pleurer démesurément et elle devait se prendre une toute petite voix. Même à cela, je sursautais et je pleurais de manière hystérique. Toutes les photos de moi à cet âge sont affreuses. J’ai les yeux exorbités de peur, ce qui contraste fortement avec le petit sourire angélique de ma grande sœur et l’expression calme et paisible de sainte maman.

Parallèlement à tout cela, comme s’il habitait complètement sur une autre planète (sans contredit : la sienne…), cauchemar désirait avoir beaucoup d’autres enfants et surtout des garçons, qui prendraient un jour la relève de sa compagnie. Ma mère a cependant refusé catégoriquement, car même si elle désirait obéir aux curés, elle savait qu’elle ne survivrait pas à cela. La « famille » s’est arrêtée là, par chance.

Du plus loin que je me souvienne, depuis environ mes 2 ou 3 ans, je ressentais des peurs à me glacer le sang. Peur toutes les nuits, au point de me coller le dos sur les barreaux de ma couchette. Aussitôt que j’ai eu un vrai lit sans barreaux vers l’âge de 3 ou 4 ans, je demandais toujours à ma mère à ce que mont lit soit collé directement sur le mur. Je m’y appuyais le dos en mettant tous mes nounours devant. Plus il y en avait, plus je me sentais en sécurité.

Je choisissais instantanément la plus petite chambre de toute la maison, car je pouvais ainsi tout voir. J’ai toujours fait de l’insomnie ; un seul petit bruit me réveille complètement. Dès mon plus jeune âge, je m’endormais souvent seulement au levé du jour, car je laissais mes yeux ouverts aussi longtemps que je le pouvais et ils finissaient par se fermer de fatigue. Encore maintenant, je panique si je dois dormir de dos à une porte. Même si j’attrape des crampes tout partout, je dois absolument voir d’où peut provenir le danger. Je mets encore un énorme nounours sur le côté de la porte… car si un fou s’approche, il va devoir se butter d’abord sur la grosse peluche, le temps que je puisse réagir.

Même le jour, je suis encore incapable de prendre une douche car le bruit de l’eau m’empêche d’entendre d’éventuels ennemis. Je me suis finalement fait une habitude des bains mousseux tous les jours, peu importe la différence sur ma facture d’électricité.

Je me souviens très bien que les coups ont débuté vers l’âge de 3 ou 4 ans. L’âge où j’ai eu mon premier lit sans barreaux, où mes petites pattes savaient courir très vite. Je tentais de rester le plus longtemps possible couchée, mais à force de tenir mes yeux grands ouverts et tomber de fatigue… je finissais par voir tout plein de choses bouger tout autour de moi!!! C’est comme si la noirceur devenait pleine de petites lumières, avec des zones plus sombres, et parfois à force de lutter contre mon sommeil… je voyais ces zones noires et ces lumières brillantes prendre la forme de toutes sortes de choses… et c’était l’horreur. Prise de panique, je partais à la course comme une flèche sans regarder devant moi pour aller trouver ma mère dans son lit.

Devinez sur qui je tombais toujours? Cauchemar. Bien endormi, et vraiment pas content de se faire réveiller par une hystérique.

Petif et petaf. J’étais trop jeune pour comprendre que le lit avait deux côtés, et c’est bien sûr cauchemar qui était toujours couché près de la porte de chambre. Pas moyen de rejoindre ma mère.

Je me souviens qu’à au moins trois reprises vers l’âge de 5 ans, je me suis sentie vraiment assommée. C’étaient des grosses claques par la tête, et elles étaient assez fortes pour que je sente ma tête toute engourdie, comme « gelée » et que j’aie le corps tout endolori. Mais j’étais tellement en état de choc que je restais quand même plantée là dans l’unique but de voir enfin ma mère.

Elle se réveillait heureusement à tous les coups et venait me recoucher en m’expliquant que je devais vite faire dodo. Elle replaçait tous mes nounours avec moi, puis je me retrouvais à nouveau seule avec la noirceur et tout ce que je finissais par y voir bouger.

Pourtant, je revois aussi devant moi le lit de ma grande sœur et sa petite silhouette qui y dormait à poings fermés. Cela aurait pourtant dû me rassurer, mais non. La fenêtre était sur le mur du fond derrière elle, toute la noirceur-qui-bouge nous entourait et je ne pouvais pas m’empêcher d’halluciner encore.

J’ai toujours vu cauchemar frapper à coup de poing près de nous aussitôt qu’on ne disait pas comme lui.

Alors avec tous les bings et bangs autour de nous le jour, le silence me faisait vraiment peur la nuit. Il me semblait toujours que tout était pour exploser. Le pire moment du jour, c’est quand cauchemar arrivait pour dîner. Ma mère était peureuse et avec raison, alors elle barrait toujours la porte d’entrée. Mais si la porte n’était pas débarrée à la seconde près de l’arrivée de son altesse royale, cauchemar bûchait dans la porte avec ses bottines en cap d’acier en sacrant. Ça émettait un bruit assourdissant et le sang me glaçait. Il entrait en grosse colère dans la maison, en insultant ma mère, et je me souviens que je figeais toujours en voyait les traits de son visage. Le monsieur n’avait vraiment pas l’air content. Il avait même un regard de tueur.

Le roi couronné n’a jamais voulu posséder une clé et suivre les conseils de ma mère, bien sûr. Cauchemar était bien trop con et égocentrique pour comprendre qu’une porte barrée, ça protège des fous. Et ma mère était malheureusement trop sainte pour lui en faire avaler une de force.

Du plus loin que je me souvienne, je revois ma mère pleurer. J’irais même jusqu’à dire qu’il ne s’est jamais passé une semaine entière sans qu’elle ne fonde en larmes. Elle répétait constamment : « il va me faire mourir ». Si elle pleurait devant cauchemar, ça ne changeait rien car il la traitait de maudite braillarde. Entre toutes ces larmes, elle conservait un regard rempli de tristesse en plus d’un ton de découragement dans la voix.

Aller jusqu’à la toilette pour faire pipi la nuit était un supplice pour moi. Je prenais ma course mais à quelques reprises, je me suis luttée en pleine face dans les jambes de cauchemar. Évidemment, encore pif et paf. Je retournais à la course dans mon lit. Alors à maintes reprises lorsque je tombais de sommeil, je n’arrivais plus à me retenir et ma mère était découragée. Un matin, elle s’est mise à pleurer et je n’ai plus jamais refait pipi au lit par la suite. Mais bon sang que c’était l’enfer, car je me retenais jusqu’à la clarté du jour.

Tristement, les fois où je parvenais enfin à m’endormir dans la noirceur, je faisais le même rêve affreux où un homme (ou un loup) entre par la porte de ma chambre pour venir me tuer. Alors dans la noirceur, je n’osais même plus respirer de peur que quelqu’un m’entende et veuille me tuer. L’horreur. Encore maintenant, il m’arrive à nouveau de faire ce même maudit rêve et de retenir ma respiration. La lumière est dans le dos de l’homme qui a une forte carrure. Je ne vois pas ses traits, mais je sais qu’il se dirige droit vers moi pour me tuer car je sens son immense colère et toute l’ampleur de sa haine.

Ma grande sœur avait deux ans de plus que moi. Avant qu’elle ne commence la maternelle, je me souviens qu’un après midi durant la petite sieste de ma mère, elle avait entrepris de chasser tous les démons qui me faisaient peur dans notre chambre. Ce fut un magnifique moment vraiment mémorable pour moi. Elle faisait semblant de les attraper avec ses mains et elle les enfonçait ensuite dans une vieille sacoche, puis ensuite… elle tapait à coups de poings dessus en riant. Ces images m’ont vraiment marquée, car si vous saviez combien j’espérais que tout cela soit bien réel. J’ai rigolé en complicité avec ma grande sœur toute la journée… jusqu’au soir venu.

Je me souviens aussi que j’ai développé une autre peur incontrôlable à cette époque : je craignais qu’un avion ne tombe sur notre maison. J’imaginais des images très claires où nous périssions tous étouffés car l’avion nous enfouissait très creux dans la terre par sa grosseur et son poids. Je me revois assise sur le comptoir de la cuisine pendant que ma mère faisait la vaisselle, car je n’arrivais pas à arrêter de pleurer.

Aussitôt que ma grande sœur a commencé la maternelle, son attitude a changé envers moi. Elle s’était fait de nouvelles amies qui lui ressemblaient beaucoup plus que moi. Car ma sœur et moi avons toujours été très différentes. Elle était hyper calme et dans sa bulle, j’étais hyper stressée et le nez fourré tout partout. Cela lui a valu moins de claques par la tête que moi pendant un bon moment, quoique cauchemar ne l’a pas du tout épargnée à d’autres niveaux.

Toute mon enfance, j’ai très souvent entendu cauchemar traiter ma sœur de grosse tarte car elle réussissait moyennement à l’école. Ces paroles là n’ont certainement pas aidé cette jeune fille à étudier davantage… ni tout le stress qu’elle vivait à la maison.

Ma grande sœur se réfugiait surtout devant la télé, souvent dans sa chambre. Ainsi, elle se maintenait régulièrement hors de portée des assauts de cauchemar. Elle n’aimait pas vraiment jouer avec moi car je lui tombais beaucoup sur les nerfs, et je la comprends maintenant. Si nous jouions à la poupée, j’étais du style à dire : « la mienne fait ça, la tienne fait ça, et bla bla bla bla bla ». Elle, elle préférait se taire et habiller ses poupées bien tranquillement. À l’école, je crois qu’elle faisait le stricte minimum car elle avait intelligemment compris que peu importe les efforts qu’elle fournirait, cauchemar ne l’aimerait pas davantage. Car après tout, sa petite sœur était une vraie « bolle », et qu’est-ce que ça lui donnait vraiment tout ça? Rien du tout.

J’ai débuté la maternelle vers l’âge de quatre ans et un beau jour, je me suis sauvée de l’école car j’avais une peur maladive de tout le monde. Je me réfugiais régulièrement dans la salle de bain en montant sur les toilettes pour ne pas qu’on puisse même voir mes pieds, tout en m’y embarrant solidement. Je rêvais de pouvoir disparaître par magie… Cette journée là au matin, j’avais attendu que tout le monde sorte du petit autobus et je faisais exprès de trainer de la patte. La porte de l’école ouverte, je me suis cachée derrière. On l’a enfin refermée en ne me voyant pas. Bingo. Alors mes petites pattes se sont encore élancées…

C’était l’hiver donc je venais à peine d’avoir 5 ans. Il y avait des grosses banques de neige dans le village. J’ai parcouru le chemin inverse pour me rendre chez moi car je le connaissais bien. Puis j’ai vu cauchemar sur le trottoir qui se dirigeait vers son usine. Je me suis vite cachée derrière une banque de neige devant un petit dépanneur près de notre maison. Comme il s’en allait la tête penchée par en avant en ruminant encore sûrement comme un ogre, il ne m’a pas vue du tout. Aussitôt que cauchemar a été loin, j’ai pris ma course pour voler jusque dans les bras de sainte maman.

Je ne sais pas trop comment, mais ma mère m’avait déjà vue de l’extérieur de la maison et elle m’attendait très inquiète… et fâchée. Elle était vraiment angoissée et m’a expliquée les enjeux : c’est dangereux et on aurait pu t’enlever. Tout ça, je l’ai vite compris. Mais le moins drôle, c’est qu’elle avait eu le temps d’appeler cauchemar entre-temps, car la maitresse l’avait alertée de mon absence. Il est revenu de l’usine en grosse colère, il a baissé tous mes vêtements et sous-vêtements et je me suis retrouvée les fesses en l’air, couchée par terre sur ses genoux, face contre terre. Il a frappé très très fort.

Je criais en pleurant et je le suppliais d’arrêter mais il répétait comme toujours : « tu le mérites ». Ma mère lui a encore crié « maudit fou » et tout s’est enfin terminé.

Je ne me suis plus jamais enfuite de l’école. Même que j’en ai fait mon refuge préféré pendant de longues années, en travaillant très fort pour être toujours le chouchou préféré des professeurs et en maintenant des moyennes extraordinaires jusqu’à l’université. En effet, j’ai vite remarqué que pour la majorité des êtres humains, il existe un genre de « loi naturelle » : si on est gentil, ils sont gentils. Contrairement à des êtres inhumains comme cauchemar, qui vous maltraiteront jusqu’à votre mort s’ils en ont l’opportunité.

Dès mon plus jeune âge, lorsque cauchemar entrait dans une pièce, j’avais une grosse boule dans le ventre. Maintenant, je sais que ça s’appelle « le trac ». À cause de cela, vers 4 ans, je me suis mise à rire pour rien, de manière peut-être démesurée. Cela a donné à cauchemar une autre bonne défaite pour exprimer sans gêne ses sauts d’humeur et me ramasser régulièrement la tête avec une bonne claque en répétant : tu le mérites. En fait, je suis devenue son punching bag préféré. Je me sentais assommée, la tête qui tourne un bon moment à en perdre le nord.

Ma sœur étant maintenant à la maternelle, je m’ennuyais souvent terriblement le jour car ma mère travaillait toujours dans les papiers de la compagnie. Je ne devais pas la déranger. Une triste fois, j’ai eu l’idée de donner un gros bisou à sa petite chienne Finette. Ma mère m’avait pourtant bien prévenue de m’en tenir loin. Car comme Finette n’était pas habituée avec des enfants, surtout pas à se faire embrasser sur la bouche… elle était très agressive. Finette a donc répliqué… en me bisoutant à sa propre façon. Elle m’a mordu fortement la lèvre inférieure et j’en garde d’ailleurs toujours une cicatrice.

Pauvre toutou. Quand le soir venu cauchemar a su cela, il a donné un terrible coup de poing sur la tête de Finette. La petite chienne en saignait des yeux. J’étais pétrifiée.

Je n’ai plus jamais approché Finette. Non pas que j’avais peur d’elle, car bien franchement, sa morsure n’était rien comparé à la violence de cauchemar. Mais je craignais vraiment que cauchemar la tue si jamais elle me mordait à nouveau. Par chance, Finette a pu mourir de mort naturelle. Je crois que cet épisode m’a fait développer un très grand lien affectif avec les animaux. Je me souviens que je me tenais loin de Finette, mais je l’aimais beaucoup et je l’observais sans arrêt, car je ressentais vraiment qu’on était en danger toutes les deux à égalité!!!

J’ai d’ailleurs remarqué que sur notre planète, l’évolution des droits des animaux coïncide toujours aussi avec celle des droits des enfants. Méchant hasard très lourd de sens… Et je rêve du jour où les déséquilibrés leur foutront enfin la paix à tous les deux.

Cauchemar conduisait souvent dangereusement, même avec ses propres enfants à l’intérieur. À l’époque, les ceintures de sécurité n’étaient pas à la mode. Je me souviens que ma grande sœur et moi devions souvent nous tenir fermement après quelque chose et que lors de certains virages ou de freinages, on se ramassait tout partout à gauche et à droite. Tout dépendait toujours du degré de sa colère. Lorsque le ton de la conversation avec sainte mère devenait orageux, c’était signe de danger. Dans les longs voyages, j’attrapais de grosses nausées et une fois lorsque j’avais environ 6 ans, ma mère n’a pas eu le choix d’improviser en saisissant le chapeau de cauchemar pour éviter les dégâts. Le couvre chef était gaspillé et s’est retrouvé dans une poubelle le long de la route. Cauchemar était très fâché et en a reparlé pendant fort longtemps, en me regardant avec des couteaux dans les yeux.

Il parait que la première phrase que j’ai dite était : « est bon, stake, hein papa ?». Dans les restaurants, même quand il commandait un méga gros milk shake, je demandais toujours : « comme papa ». En réalité, j’essayais ainsi de « lui faire plaisir », peut-être même de lui rappeler un peu que j’étais « sa fille ». Sauf qu’après, le mal de cœur me prenait et c’est moi qui en subissais encore les conséquences.

Nous avons déménagé à quelques centaines de mètres lorsque j’avais environ sept ans, dans une maison beaucoup plus grande. Lors de la construction, j’aidais beaucoup et je m’efforçais de bien planter les clous en belle ligne droite pour impressionner cauchemar afin qu’il m’aime un peu. Mais les marteaux étaient vraiment très gros, et il me réprimandait toujours de ne pas réussir à le tenir par le bout du manche. Mon poignet était vraiment trop petit et ça me faisait échapper le marteau. Il me disait alors que j’avais une tête de mule comme ma mère.

J’ai ainsi eu ma première chambre toute à moi, mais j’ai choisi la plus petite de la maison, mon lit pouvant être encadré par trois mûrs grâce à la cheminée du foyer. J’avais une jolie tapisserie rose lignée à la verticale avec plein d’oiseaux et de branches entrelacées. Mais zut et zut. Apeurée dans mon lit, toujours collée contre le mur du fond, je luttais contre le sommeil et… tous les beaux dessins de ma magnifique tapisserie… se réveillaient joyeusement!!! Ho la la…

La chambre de ma sœur était juste à côté de la mienne et nous avions maintenant chacune de grands lits doubles. Mais oh malheur… elle ne pouvait pas du tout me supporter à côté d’elle. Il faut dire que toute la nuit, j’essayais de me coller le dos sur elle, la pauvre. Elle me virait toujours de sa chambre assez vite fait, douée comme elle était à chasser les petits démons d’autrefois. Une nuit, comme je l’avais complètement réveillée, elle a enfin accepté un « deal » : elle me laisserait dormir en-dessous de son lit, sur le plancher.

Ça n’a finalement pas fait mon bonheur, parce qu’il n’y avait pas moyen de m’appuyer le dos sur quoi que ce soit.

Aie oui, ça devenait encore parfois tellement insupportable que je prenais encore ma course pour aller retrouver ma mère dans sa chambre. Une aubaine, j’avais enfin compris de quel côté du lit elle dormait. Sainte maman venait me recoucher dans mon lit tout en essayant de me calmer. Je me souviens qu’il me soit arrivé de pouvoir rester un moment collée contre elle à quelques reprises. C’était le paradis et je tombais tout de suite dans un profond sommeil.

Toutes les fois où j’empêchais cauchemar de dormir à cause de mes courses folles vers ma mère, tout le lendemain, il me jetait des regards de tueur. Je savais qu’il me détestait réellement. Vers 10 ans, je me suis levée de mon lit encore en état de choc et je me suis retrouvée… prise entre ce qui m’a semblé être… quatre mûrs. Je criais à tue tête. Lorsque ma mère a allumé la lumière, il n’y avait pourtant que la cage d’escalier du grenier qui formait un « L ». Je ne comprends toujours pas pourquoi je sentais une cage tout autour de moi en ne parvenant pas à en sortir… Peut-être parce que je me sentais tous les jours emprisonnée? Cela a donné un autre excellent prétexte à cauchemar pour me traiter encore de maudite folle.

Les seules fois où j’ai vu cauchemar « joyeux » et les yeux remplis de respect et de passion, c’est lorsqu’il parlait de ses machines. Il était très doué pour les inventer et les fabriquer, encore plus pour se venter de ses talents. Tout l’argent qu’il en tirait faisait en sorte que les gens étaient fortement impressionnés par lui. Je me souviens que ça me faisait peur encore davantage.

Moi, j’étais loin de ressembler à ses machines. Plus cauchemar me maltraitait en démontrant qu’il me détestait, plus ma grande sœur aussi ne voulait plus rien savoir de moi elle non plus, et plus je me sentais moi aussi comme indésirable, inutile, trop différente, folle, et coupable de tout.

La relation avec ma sœur est devenue très chaotique. Je me cachais partout dans la maison pour essayer d’attirer son attention en l’espionnant… et parfois aussi… en lui faisant des « beu ». Brillamment, elle avait établi son propre système où elle me disait : « j’accumule ». Ça pouvait en général se rendre jusqu’à environ 4 « j’accumule ». Puis c’était pif et paf. Un jour, elle m’a tiré les cheveux tellement forts que j’en ai saigné. Une autre fois, ses coups de pieds dans les jambes m’ont fait des trous dans les tibias. Mais pour moi, tout comme Finette, ce n’était toujours rien comparé à la violence de cauchemar alors… j’ai plutôt commencé à mendier son attention. Ça n’a pas fonctionné davantage.

Je passais la majeure partie de mon temps à étudier ou à suivre ma mère sur les talons lorsqu’elle sortait enfin de son bureau. J’adorais lui aider à préparer tous les repas et j’étais une pro pour éplucher vite fait les patates et faire rapidement la vaisselle. Ma mère faisait d’immenses jardins et il nous fallait des heures pour remplir des centaines de pots de légumes coupés et de tomates fraiches. Il y avait aussi toujours la voiture à nettoyer, le ménage et la couture. J’aimais vraiment beaucoup la machine à coudre. Ma mère me laissait fouiller dans tous ses restants de dentelles et je fabriquais des tas de robes à mes précieuses Barbies. Lorsque la machine se bloquait, je n’avais qu’à dire « maman »… et elle sortait de son méga bureau pour venir replacer correctement le fil du moulin. Sa patience était vraiment sans limite. En effet, pour endurer cauchemar, il ne fallait pas avoir de limites.

Je me suis mise à apprivoiser et nourrir les chats errants qui vagabondaient autour de notre maison. À force de patience, j’ai gagné le Gros minou jaune et la petite Tartine. À force de larmes, ma mère a accepté de les garder dans la maison! J’étais déjà un peu moins seule.

Une journée lorsque j’avais neuf ans, j’ai vu ma mère partir à la recherche de cauchemar car le repas était prêt depuis un bon bout de temps. Elle s’est dirigée dehors vers lui et à environ 200 pieds de moi, j’ai vu ma mère parler à cauchemar et ensuite se retourner pour revenir à la maison. Il lui a alors asséné un coup de pied au derrière avec ses bottines en cap d’acier. Ma mère mesurait à peine 5 pieds 1 et ne pesait pas plus de120 livres. Inutile de vous dire que cet impact lui a même fait perdre l’équilibre.

Je suis demeurée figée dans la fenêtre de cuisine, en voyant ma mère pliée en deux et revenir en boitant vers la maison. Elle s’est dirigée de peine et de misère à la toilette et ses petites culottes étaient pleines de sang. Elle pleurait à en perdre le souffle en répétant… maudit fou… maudit fou…

Je me suis mise à détester cauchemar.

Vous dire le nombre de regards noirs et de claques que je me suis prises ensuite… car à cette époque là, moi aussi j’ai vite appris à le regarder avec des poignards dans les yeux. Et il détestait cela.

Vers l’âge de 8 à 11 ans, je me suis mise à faire un genre de somnambulisme inquiétant. Tout commençait toujours par un rêve angoissant. Ensuite, je me levais en état de choc, étouffée, je voyais notre maison entièrement détruire, je répétais que tout était de ma faute et ça me prenait au moins trente minutes avant de revenir dans la réalité en entendant ma mère tenter de me raisonner. Elle a demandé l’avis du médecin à cette époque et il lui a dit que c’était un problème de stress. Mais rien n’a changé…

Vers 8 ans, j’ai eu le malheur de voir un joli film ou un père prend sa petite fille dans ses bras parce qu’elle lui a joué un vilain tour. Mon père à moi ne me prenait jamais dans ses bras affectueusement, sauf le temps d’une rare photo. Jusqu’à 9 ans, je me suis mise à me cacher dans ses vêtements et dans ses bottes de travail dans le garde-robe de l’entrée quand il arrivait de travailler le midi. Lorsqu’il ouvrait la porte pour y déposer ses choses, je sortais la tête en faisant : « beu !!! »  Évidemment, toutes les fois, ce fut un drame. Contrairement à ma grande sœur qui avait établi un système de « j’accumule », cauchemar n’émettait jamais aucun avertissement avant de bûcher sur moi.

Les coups intenses affluaient de toute part et ça faisait encore très mal… je ne réussissais à me sauver seulement qu’en fonçant vers la porte de droite… qui sortait alors de ses railles par la force de l’impact. Cauchemar me traitait immanquablement de tous les noms en me poursuivant jusqu’à ce que ma mère l’arrête. J’ai compris qu’un film ce n’était qu’un film et au bout d’environ six reprises, j’ai arrêté. Une chance, car il m’aurait tuée.

Je me demande aussi, si en lui faisait vivre ces peurs, je ne désirais pas intentionnellement tenter de me venger de lui, en lui remettant un peu de toute la terreur qu’il nous imposait constamment. Car à toutes les fois, c’est bien certain, ça valait des millions de voir sa face, apeuré à en devenir livide… les rôles s’inversaient, pour au moins une petite seconde.

Sur l’heure du dîner, l’enfer. Tout en mangeant, cauchemar émettait des bruits de porc dans son auge, parsemé de gros sacres, son préféré étant « hostie de saint-crème », en nous racontant son avant-midi de travail comme s’il n’y avait que lui au monde (et dans un monde rien qu’à lui), en répétant bon nombre de fois qu’il avait même lancé un marteau à un de ses employés qui ne lui obéissait pas… Il aurait carrément pu tuer quelqu’un. Je regardais du coin de l’œil ma grande sœur, car elle avait le don de parler expressivement avec ses yeux sans ne rien dire du tout. Le fou rire me prenait… puis encore bang et bang ainsi que des assiettes renversées.

Cela me faisait beaucoup de peine de constater les dégâts de nourriture et de voir les yeux de ma mère se remplir de larmes. Je me sentais vraiment très coupable car cauchemar me mettait bien sûr tout ça sur le dos.

Comment est-ce que le rire d’une petite fille peut être à ce point là insupportable? Depuis que je suis adulte, lorsque je vois des enfants rire démesurément, ça me fait toujours monter les larmes aux yeux. En plus, le rire des enfants est tellement communicatif que même s’ils viennent juste de me lancer une bonne craque, je ne peux pas m’empêcher de m’esclaffer moi aussi.

Lorsqu’il y avait des gens, cauchemar était vraiment très différent. On pouvait s’approcher beaucoup plus près de lui, et j’avais l’impression tout à coup de jouer à un drôle de jeu, comme si j’étais devenue une importante actrice dans un beau film avec une caméra cachée quelque part. Cependant, je me souviens que cauchemar demeurait très soupe au lait verbalement et qu’il coupait toujours la parole à tout le monde, surtout à ma mère.

Je me souviens d’une fois vers 9 ans, lorsqu’il n’y avait pas de visite, dans le bureau de ma mère, où je me suis approchée de cauchemar et que j’ai même réussi… à me glisser sur ses genoux. J’étais vraiment super méga excitée et… j’ai osé toucher à son visage.

Il m’a descendue de là à la vitesse de l’éclair grâce à ses bonnes grosses claques, car semble-t-il, je lui avais mis le doigt dans un œil.

Je remercie tout de même infiniment le mûr nord en bois « v-joints » de la maison canadienne qui a heureusement partagé avec moi la place de punching bag à de nombreuses reprises, en mangeant un méchant paquet de coups impossibles à prévoir. Encore bang et Bang. Ça émettait un terrible bruit sourd, suivi de la ribambelle de sacres. Toujours accompagné du petit leitmotiv de ma mère : « maudit fou ».

Il faut dire qu’en grandissant, ce mur devenait maintenant indispensable puisque la « maudite haïssable » était devenue pas mal rapide. Vers l’âge de 11 ans déjà, j’étais en effet une vraie pro pour éviter les coups. Cauchemar tapait de plus en plus dans le vide… ses frustrations grandissaient… et je me demande même si ce n’est pas ça qui l’a amené à lire son paquet de livres sur le karma lorsque j’avais environ 12 ans.

Le jack pot. Il s’est alors servi de tous les gourous farfelus de la planète et de leurs belles théories fofolles afin de se déresponsabiliser complètement. Il ne lui ait jamais venu à l’idée d’aller voir un psy, bien sûr. Les histoires de réincarnations où on lui a dit qu’il était un moine dans ses vies antérieures, lui ont vite plu bien davantage. Il s’est mis à faire du yoga transcendantal, entre autre. Ainsi, il s’est mis à me répéter que « ce sont les enfants qui choisissent les parents ». Ouf…

Sans oublier Dieu, Dieu et Dieu. Sur mon enregistrement sonore du 2 février 2002, il me redit que Dieu lui envoie des beaux messages : « ça me dit quelque chose tout d’un coup… pis j’écoute… tsé… j’écoute les messages d’en haut ». Il essaie encore de me convaincre qu’il n’y a rien de mieux que de pardonner et que Dieu est toujours là pour régler tous les problèmes. Bien oui toi. Les tiens peut-être, mais jamais les miens.

Ce qui m’a beaucoup contraint à l’appeler quand même « papa » pendant 36 années, c’est justement la fameuse religion catholique, mais sous l’angle du sens moral de ma mère. J’ai lu très jeune la vie de sainte Thérèse de Lisieux et ma mère était justement elle aussi une sainte martyre. Moi aussi je voulais être parfaite, même si j’ai bien failli en mourir.

Toute mon enfance, mes amies n’avaient presque jamais le droit de venir chez moi et surtout pas d’y dormir. Je ne suis jamais allée coucher ailleurs non plus. Ma mère avait une crainte bleue de tout ce qui était hors de son contrôle, probablement parce qu’elle avait déjà du mal à comprendre l’horreur qui se déroulait dans sa propre maison. Moi, plus je connaissais le monde extérieur, plus je trouvais que c’était souvent bien plus rassurant que de vivre chez moi.

Mais depuis mon enfance, j’ai gardé une précieuse amie avec qui je parviens encore aujourd’hui à rire de tout et de rien. Lorsqu’il nous arrive une grosse tuile, on commence par en pleurer et tenter de trouver des solutions, mais en se faisant… on se laisse toujours aller à sortir toutes les niaiseries possibles sur le sujet car c’est plus fort que nous. Je suis certaine que tous ces rires m’ont aidée à ne pas devenir folle. En effet, j’ose croire que je ne le suis pas… malgré tout ce que certains en pensent.

Mes plus beaux souvenirs d’enfance sont sans contredit mes cours de danse et mes livres de Tintin. J’ai débuté la danse vers l’âge de 4 ans. Notre enseignante ressemblait à Angelina Jolie, avec de magnifiques yeux bleus foncés tirant sur le violet, un accent anglais adorable, et un sourire incroyable. C’était le paradis. J’étais toujours choisie pour être devant ou pour interpréter les mimes car j’y mettais tout mon cœur. Sur scène, je me sentais transportée au ciel sur des nuages, avec tous les beaux costumes colorés, avec tout plein de petits brillants, les jolis maquillages et surtout, dans un lieu où il était possible d’exprimer tout ce qui bouillonnait en moi.

Tintin lui, c’est le modèle d’humanité qui m’a sûrement aidée à parfaire mes études et à pousser toujours plus à fond ma curiosité et mon désir de partir le plus tôt possible de chez moi. Ce petit personnage voyageait à travers le monde, et réussissait à mettre en pièce tous les méchants de la planète, en ne craignant jamais d’y laisser quelques plumes, sachant toujours distinguer le bien du mal. J’aurais tellement aimé que mon Tintin règle le cas de cauchemar… ha que lui il ne l’aurait pas manqué, contrairement à notre système de justice pourri.

À part les premiers ouvrages d’Hergé qui sont tristement colonisateurs, toute son œuvre est dirigée de manière grandiose avec un sens aigu des plus petits détails de la vie, autant en utilisant l’humour que de grands élans dramatiques. J’ai eu la chance d’écrire à Hergé lorsque j’avais 11 ans et je possède une lettre avec sa signature datée de janvier 1978. C’est une des choses qu’il y a de plus précieux dans ma maison, car son petit Tintin, il n’avait peur de personne, contrairement à moi, et ce fut sans contredit mon premier grand amour.

Nous avons déménagé du village lorsque j’avais environ 12 ans. Je me suis retrouvée non loin de là à la campagne et ça n’a pas changé grand-chose de mon isolement, sauf pour mes cours de danse qui ont soudainement pris fin. J’étais anéantie. Lors des spectacles annuels, ma mère avait entendu des employés de la compagnie dire des stupidités du style : « elle est bien tournée la petite ». Ça l’a profondément choquée et elle s’est mise à détester les maillots moulants. Malgré tous mes talents, elle refusait que je songe même un jour à devenir une danseuse professionnelle.

Ma mère nous a alors inscrites ma sœur et moi à des cours de musique. Je me suis alors plongée à fond dans le piano.

Lors de la construction de cette troisième maison immense, cauchemar m’a un jour obligée à monter sur le toit à une hauteur d’environ 20 pieds pour aller lui porter un outil qu’il avait oublié en bas. Je l’implorais de tenir l’échelle, mais même si elle branlait fortement, il a refusé en me traitant de peureuse. Je me souviens que rien ne retenait l’échelle, ni à droite, ni à gauche et elle vacillait vraiment beaucoup. Le pire moment, c’était de réussir à passer ma jambe sur le toit et ensuite, de refaire tout cela en sens contraire. Mes jambes tremblaient et la tête me tournait, mais je savais que si je tombais, de toute façon, cauchemar aurait été tout simplement débarrassé de moi, en affirmant que c’était la volonté de Dieu. Alors j’ai tenu bon et j’y suis parvenue. Par la suite, je feignais toujours de ne pas comprendre lorsqu’il criait mon nom…

Cauchemar a aussi entrepris de fabriquer plusieurs meubles lui-même, dont la méga table de cuisine avec ses fameux gros bancs hyper lourds assortis. Tous les morceaux de bois ont au moins trois pouces d’épaisseur et sont quasi indestructibles. Car dans nos deux premières maisons, comme l’heure des repas était très chaotique, les mégas coups de poings faisaient trop branler la table et il a dû recoller les chaises constamment, tant il adorait les pousser violemment de tout bord tout côté.

Toujours est-il que lorsque j’avais environ 15 ans, ma grande sœur de 17 ans, chasseur de démons qui avait instauré les brillants « j’accumule », s’est retrouvée un jour à la table de cuisine devant cauchemar, qu’une grosse dispute a éclatée et que tout à coup, elle a osé lui répondre…

« Vas chier. »

Je n’arrivais pas à le croire. Ce fut une des secondes les plus effrayantes de toute ma vie. Je me suis dit : il va la tuer!!!

Moi, j’ai réussi à trouver ce courage là seulement en 2003, lorsque j’avais 37 ans et que je me tenais à au moins plusieurs dizaines de pieds de cauchemar, en plein stationnement public.

Même si ma grande sœur s’était toujours tenue bien loin de toutes les guerres, elle le connaissait elle aussi que trop bien. Elle s’est précipitée pour monter l’escalier à la course et elle a couru s’embarrer dans sa chambre. Cauchemar l’a vite suivie et a défoncé sa porte de chambre en deux. Elle s’était réfugiée accroupie entre son lit et un mur. Cauchemar a bûché sur elle comme un malade. Ma mère et moi avons crié à tue tête et il est enfin parti.

Je suis certaine que ce qui a confondu ma sœur pour qu’elle ose ainsi confronter cauchemar avec une telle hardiesse, c’est que depuis que le monstre lisait ses livres de Karma, ma sœur s’était beaucoup rapprochée de lui et elle était même devenue sa grande complice spirituelle. Je les entends encore discuter des martiens et des extra-terrestres, de réincarnation poussée, et de toutes les histoires les plus abracadabrantes les unes que les autres concernant « l’au-delà ». Ma sœur embarquait vraiment à fond dans tout ça. Je crois que ce jour là, ma sœur a cru à tort que cauchemar l’épargnerait à cause de leur compréhension mutuelle de « la vie après la mort ».

Pourtant dans notre maison, la mort faisait déjà partie de notre vie, depuis toujours. Moi, comme toutes ces histoires me foutaient une peur inexplicable, ça m’a plutôt éloigné encore plus de cauchemar et de ma sœur. Il faut dire que je voyais déjà tout bouger dans le noir, en plus des singeries de ma tapisserie et de mon somnambulisme délirant, alors… stop. Ma mère aussi y était très réticente, et elle était mon seul point de repère dans tout ce chaos, alors je l’ai sûrement aussi un peu imitée.

Après le drame du « vas chier », ma grande sœur pleurait tellement que je ne voyais plus ses yeux. Les larmes inondaient ses joues. Elle répétait : « il voulait me tuer »… Je sais qu’elle avait raison. Elle demeurait recroquevillée dans son petit coin, puis on ne pouvait pas rater de voir sa porte de chambre totalement défoncée qui pendait lamentablement en deux sections détachées…

La tristesse que j’ai encore ressentie est indescriptible.

Lorsqu’on se fait taper dessus, on voit les coups venir mais c’est notre tête ou notre corps qui absorbe la dureté des coups et on se ferme souvent les yeux tout en essayant de se protéger. Lorsqu’on voit quelqu’un qu’on aime se faire bûcher dessus, on ne ressent pas de mal physique, mais les images devant nos yeux sont atroces à supporter. Lorsque j’ai vu ma mère recevoir un coup de pied et ma sœur manger une méchante volée, ce sont ces deux mauvais films qui sont demeurés le plus fortement imprégnés dans mes souvenirs. Je me considérais moi-même comme une maudite haïssable à force de me le faire dire. Mais je n’ai jamais pu admettre que ma mère et ma grande sœur l’étaient. Je me suis mise à ressentir une colère indescriptible, mais j’ignorais quoi en faire. Je me sentais brûler vive.

Comme si je ne me sentais pas déjà assez perdue, lorsque j’avais environ 11 ans, cauchemar nous a tous obligé à suivre une fin de semaine entière, un cours de yoga transcendantal. Ça, ça veut dire en résumé : explorer un atelier intérieur jusqu’à y voir apparaître un paquet de choses inexplicables. Je me rappelle qu’il avait dû obtenir une autorisation spéciale pour ses deux filles car le gourou n’était pas supposé y laisser entrer de jeunes enfants. Bien sûr, il n’y a rien que quelques cent piastres ne puissent pas arranger pour ces bizarroïdes là.

Je ne veux pas généraliser, mais je me souviens très bien que le gourou avait le même air hébété que cauchemar, en souriant démesurément, comme si le monde lui appartenait. Ma mère et moi, nous nous en étions même fait la remarque en cachette. Le gourou nous a fait faire un jeu à un moment donné que je suis loin d’avoir oublié. Il s’agissait de relier 9 points et pour le faire sans lever notre crayon, il n’y avait qu’une solution possible, et c’était de sortir librement des lignes de ce carré imaginaire. Ce que j’ai vite détesté, c’est que le gourou de cauchemar était en grosse colère contre la majorité de tous ceux qui n’avaient pas réussi le truc et en plus, il nous faisait porter le poids du monde entier en nous mettant toutes les guerres de la planète sur le dos. Je me sentais énormément coupable et j’avais aussi extrêmement peur.

Maintenant, ce je peux en dire, c’est : quel con. Je suis certaine que c’est plutôt le courage des soldats, des policiers et des journalistes qui ressemble davantage à l’esprit de liberté suggérée par ce jeu. J’aurais bien aimé voir ce gourou là tout-de-blanc-vêtu avec sa pancarte « paix », tenir tête à Hitler… ou bien à cauchemar.

En effet, je compare souvent cauchemar à Hitler. Un méchant déséquilibré qui a réussi à relier à sa cause des tas de gens crédules afin de maltraiter des innocents, tout ça parce qu’il avait une forte personnalité et beaucoup de pouvoir sur eux. Un criminel très intelligent, totalement immoral et qui devient très riche, c’est extrêmement dangereux.

La partie la plus effrayante de ce cours de yoga transcendantal, c’est le moment où on nous a remis un carton avec un nom. Le gourou avait d’abord divisé notre groupe en deux, dans deux locaux différents. On devait y inscrire en haut le nom de quelqu’un qui avait un handicap, et tout en bas, son infirmité. Dommage que je n’aie pas eu l’idée d’écrire : cauchemar, fou à lier. Je me demande ce que le gourou aurait dit de ça… hi hi hi…

Ensuite, les deux groupes ont échangés les cartons. Deux par deux, un individu tenait le carton et faisait le décompte pour que l’autre individu atterrisse dans son atelier pour y « voir » la réalité du carton. Bien je sais que c’est difficile à croire, mais moi, j’ai tout vu.

Le petit atelier que je m’étais fait était super cute, d’ailleurs, il ressemble fortement à ma maison actuelle ainsi qu’à son emplacement, entouré par la forêt et les rochers. Je voyais tout en trois dimension, comme d’habitude, alors j’ai vu sortir un homme de mon ascenseur (car ça en prenait un…), barbu et en chaise roulante. Ma partenaire m’a demandé s’il y avait autre chose… j’ai vu la main de l’homme sur la roue de sa chaise et il lui manquait un doigt. Par contre, je trouvais ça tellement sauté que… j’ai dit à la dame que je ne voyais rien d’autre. Revenue hors de mon atelier avec le décompte, j’ai lu sur le carton que… il lui manquait bel et bien ce doigt là.

Bâtard de bâtard. J’ai eu tellement peur!!! En plus de déjà savoir que dans le noir, tout peut se mettre à bouger, fallait que j’apprenne qu’en dedans de moi, il y avait aussi des zones… comment dire… qui dépassent l’entendement.

Ma grande sœur, elle, était tombée paralysée et paniquait parce qu’elle avait maintenant du mal à ressortir de son atelier, tout en ne pouvant plus bouger… Devinez quoi? Sur son carton à elle, la personne était paralysée.

La plupart des adultes ne réussissaient pas à voir ou ressentir quoique ce soit. Mais mettons que ma sœur et moi, on a eu « la totale ».

Je ne sais toujours pas quoi « penser » de tout ça, mais maintenant que j’ai compris à distinguer le bien du mal, toutes ces choses ne me font plus peur, car je sais que je peux compter sur moi en tout temps, peu importe tout ce qui peut arriver « d’étrange », je me battrai pour le bien.

Vous l’aurez vite deviné, cauchemar n’est pas ressorti plus brillant de là, bien au contraire.

Vers la fin de mon secondaire, je me suis battue afin d’avoir le droit de poursuivre des études à Montréal. J’excellais dans toutes les matières, mais ma mère avait évidemment très peur de me voir partir aussi loin d’elle dans une si grande ville. À force de pleurer et de pleurer, j’ai réussi à la convaincre de me laisser y aller. Quelle chance!!!

Même en ayant fait ma demande en retard, je me suis retrouvée à l’école de musique privée Vincent-d’Indy : un vrai château, tout ça dans le style Harry Potter. J’étais émerveillée. Des pierres et des tas de boiseries anciennes, une bibliothèque en forme de tourelle avec des vitres ciselées, des escaliers en métal qui tournicotent, et à l’intérieur à tous les jours, tout plein de petits « magiciens ». Certains musiciens étaient extrêmement doués et leur talent m’impressionnait énormément. J’avais aussi beaucoup de chance à plusieurs niveaux et je me suis affairée à développer tout mon potentiel en piano, chant et composition.

Ce qui me fascinait tellement à Montréal, c’était de voir tous ces gens, tout partout, de toutes les cultures, et pourtant, de ne pas toujours voir des visages d’hommes enragés, ni entendre constamment bing et bang autour de moi…

J’avais évidemment très hâte de quitter ma « famille ». Je me suis donc mariée à l’âge de…17 ans, en été 1984. Je me souviens que lorsque j’ai dit oui devant l’autel, j’ai ajouté dans ma tête juste pour Dieu et moi : « jusqu’à ce que ce soit invivable ». Car un peu auparavant, j’avais déjà commencé à comprendre que le problème, ce n’était peut-être pas « moi »…

LE COUP DE GRÂCE

À force de lire ses livres de spiritualité poussée, cauchemar s’était élaboré un méchant scénario pour se déculpabiliser. Il a donc décidé un peu avant mon mariage de se libérer l’esprit et de m’avouer ce qu’il m’avait fait subir lors de ma naissance, en ayant d’abord pour témoin mon futur mari qui adorait cauchemar et lui ressemblait d’ailleurs dangereusement mentalement. J’appellerai donc ce dernier : son sosie.

Cauchemar m’a alors avouée qu’il m’a secouée lorsque j’avais un mois et que j’ai fait un arrêt respiratoire. Je ne saurai jamais combien de fois il m’a fait ça, car ce bout là n’a jamais été clair. Il a mis ça sur le compte du stress qu’il vivait à cause de sa sacro sainte compagnie. Il pleurait, mais je savais que ce n’était pas parce qu’il avait eu peur pour moi. Sinon, il m’aurait amenée à l’hôpital à cette époque là. Non, il pleurait bel et bien parce qu’il avait eu peur : pour lui. D’ailleurs, il a même osé me dire que Dieu voulait lui envoyer un beau message…

J’étais muette. Cauchemar et son sosie m’ont convaincue qu’il fallait absolument que je pardonne. Je suis demeurée muette. Cauchemar a aussi tenté de me convaincre… que je devais moi aussi remonter : mes vies antérieures…

Par chance, j’ai trouvé le courage de refuser catégoriquement. Si cauchemar avait été semble-t-il un bon moine dans ses autres vies, ça voulait logiquement dire que dans cette vie là actuelle, s’il était aussi méchant avec moi… c’est que moi  j’étais auparavant… un monstre??? Pas question que je lui fasse ce plaisir là. Avec toute la colère que je ressentais en moi et mes principes moraux de religion de sainte nitouche, je me sentais déjà comme un monstre. J’avais déjà bien assez de cette vie là à tenter de comprendre.

Dès 17 ans et suite à cet aveu, j’ai commencé à rêver que… je me battais contre le diable en personne. Il était horrible, très fort, gluant, les yeux rouges et sanguins… et il pouvait prendre toutes les formes inimaginables en tentant de me tuer. J’arrivais toujours à me sauver, mais jamais à lui régler définitivement son cas.

C’est ce jour là que toute ma vie a basculé. Toute mon enfance, je m’étais sentie coupable d’exister, mais comme cauchemar me répétait que j’étais une maudite haïssable à chacune de ses frappes, je croyais que tout était de ma faute. Mais… à un mois… qu’est-ce que j’avais bien pu faire pour mériter cette tentative de meurtre?

Je ne comprenais plus rien. Est-ce que les vies antérieures existaient vraiment? Pourquoi avait-il voulu me tuer? Quel était le sens de cette vie là, si personne ne nous aime vraiment? Comment peut-on vouloir tuer un bébé qui est incapable de se défendre? Pourquoi Dieu m’obligeait-il à pardonner cette monstruosité? Pourquoi m’avait-il mise dans les griffes de ce démon là…

Pour ajouter à l’horreur et sûrement pour tenter de se déculpabiliser de ses crimes, cauchemar s’est aussi mis à me répéter sans arrêt qu’à ma naissance, ma mère était déçue car elle aurait voulu… un garçon. Et que suite à la venue de ma grande sœur, elle ne voulait même plus d’enfant… Ma mère m’a juré que c’était faux, mais bien sûr, cauchemar a continué ses manœuvres pour me faire détester ma mère.

Cauchemar est parvenu à me faire douter de l’utilité de toute mon existence et de la vie elle-même. En fait, j’ai compris que personne autour de moi ne m’aimait vraiment. Personne.

Et je ne parvenais plus à avoir confiance… en personne.

Je me suis mise à accumuler les idées suicidaires, en rêvant que ma mort aurait pour effet final, de me faire enfin « aimer »…

Quelle grande naïveté. Une chance que je me suis ratée, car tout mon entourage habitait tellement sur la planète Méga-égo, que ma disparition serait passée comme dans du beurre…

Par chance, j’ai eu le réflexe de me jeter corps et âme dans mes études. J’ai rapidement terminé mon cegep en obtenant deux années consécutives le prix d’excellence académique. Depuis mon mariage, le sosie et moi avions un petit logement à Montréal tout près d’où on étudiait. Nous avions aussi débuté la construction d’une maison qui était maintenant habitable, voisine de « mes parents ». Alors le sosie a décidé d’arrêter ses études pour prendre la relève de la compagnie de cauchemar et tout était décidé pour que je doive le suivre docilement dans ses projets à lui.

J’ai pleuré tout l’été 1985 car je me sentais enterrée vivante. Tous mes amis étaient à l’Université, et je ne pouvais pas me résigner à accepter le futur qu’on me réservait. J’ai réussi à convaincre ma mère qui s’est jointe à moi pour implorer cauchemar et son sosie, qui ne voyaient pas la chose d’un bon œil. Mais j’ai tenu bon et j’ai réussi à faire ma demande à l’université, encore en retard, mais comme j’avais de très bonnes notes à leur présenter, on m’a acceptée comme étudiante libre pour que mes cours soient ensuite crédités. Bien sûr, je descendrais tous les week-ends pour rejoindre le sosie, faire son ménage et continuer la construction de la maison.

Cet automne là lorsque j’avais 19 ans, donc mariée depuis déjà un bon moment, parce que j’ai osé toucher maladroitement à la casquette de cauchemar qui travaillait à la maison et qu’il a supposément encore reçu mon vilain doigt dans son pauvre œil, il m’a encore ramassée la tête avec une bonne claque.

Si vous saviez à quel point je me suis sentie misérable…

Non, mon mari n’était pas le chevalier dont je rêvais et n’avait pas du tout le sens moral de mon amour de Tintin. Malheureusement pour moi, cet homme ressemblait étrangement à nul autre que : cauchemar. Un jour, mon supposé mari a donné un coup de poing à côté de ma tête lorsqu’on installait une porte, tout ça parce que j’échappais la porte et que je me suis mise à rire quand lui, il a finalement échappé la visse. Il s’est ensuite mis à me menacer en me disant que si je le quittais, j’aurais le droit de partir avec deux sacs à vidanges.

Un beau jour, lorsqu’on était en voyage dans un hôtel, j’ai osé lui dire que s’il continuait à m’imposer « certaines choses », je choisirais les deux sacs à vidange au lieu de lui. Lorsque j’ai eu le dos tourné, il m’a alors… pissé dessus.

J’ai toujours eu les cheveux longs, alors les petites bouteilles de champoing de l’hôtel étaient minuscules pour parvenir à me nettoyer. Je me suis juré que dès mon retour de voyage, mon plan s’échafauderait rapidement… et vive les deux sacs à vidange.

J’ai quitté rapidement le sosie lorsque j’ai eu à peine vingt ans. Cauchemar lui a immédiatement donné son propre super avocat, alors que moi je n’en avais aucun. J’ai accepté de signer tous les papiers qu’ils avaient préparés dans mon dos car même si j’avais droit à moins que rien, il y était clairement écrit que « l’épouse a quitté le domicile familial ». De lire ça, cela me faisait déjà le plus grand bien, même si toute la colère accumulée en moi était loin d’être apaisée.

J’avais un tout petit un et demi à Montréal, mais je l’adorais, sans aucun regret pour les grandes et belles maisons que j’avais connues auparavant. Mes prêts et bourses étaient dans le compte de mon ex-mari, et j’ai eu bien du mal à en récupérer une partie. Peu importe, je me suis mise à enseigner à domicile dans l’ouest de Montréal, en m’y rendant à pieds ou par le transport en commun que je connaissais déjà depuis des années. J’ai rapidement eu une clientèle très intéressante, même dans des magnifiques penthouses où l’ascenseur me débarquait directement dans l’appartement! Mes élèves m’aimaient beaucoup et cette nouvelle liberté me faisait déjà rêver d’un monde meilleur.

Les principes religieux de ma mère nous ont séparées elle et moi pour un bon moment. Comme cauchemar avait toujours travaillé à ma mort, il s’est fait un malin plaisir de venir me voir à Montréal afin de pouvoir me raconter ce qu’elle avait dit de moi et ainsi tenter de refermer les clous de mon cercueil. Ma mère lui avait dit : « j’aimerais mieux la voir morte que de putasser comme elle le fait. »

Bon. Comme j’étais déjà habituée de me faire traiter de tous les noms, je me suis dit que ça me ferait simplement un autre « titre » de plus. Cauchemar avait cependant oublié que ma mère ne me faisait pas peur, contrairement à lui. J’ai rapidement confronté abruptement ma mère car je savais depuis toujours qu’elle avait un seuil de tolérance hyper élevé avec les situations orageuses. Aussitôt que l’occasion s’est présentée, je lui ai répondu que la pire des putains d’entre nous deux, c’était peut-être celle qui acceptait de se faire traiter comme une moins que rien et bûcher dessus, tout ça, pour ne pas perdre sa belle sécurité financière.

Disons que « tout la vérité » a commencé à sortir ce jour là. Mais malgré nos positions extrêmes, ma mère et moi avons toujours continué à nous respecter malgré nos deux lignes de pensées différentes qui ont pris des directions totalement opposées suite à mon divorce.

Depuis, ma mère s’est beaucoup excusée d’avoir dit cela de moi, et moi je me suis excusée d’avoir dit cela d’elle. Ce n’est pas du tout à elle que j’en veux au fond, mais aux curés qui lui ont mis de pareilles sornettes dans la tête. J’ai bien essayé d’être aussi sainte que ma mère en me mariant vierge et pure mais je suis tombée sur le sosie de cauchemar et moi, je ne voulais pas être une sainte martyre comme elle. Devenir une femme, cela me suffisait. Je ne putassais pas : j’avais choisi de quitter un déséquilibré, et je me permettais simplement de fréquenter quelques hommes de mon choix en espérant tomber un beau jour sur la réplique de mon Tintin adoré.

Cauchemar revenait régulièrement à Montréal pour me raconter des conneries, en souriant comme un épais de m’apprendre que son sosie était présentement en voyage dans sa propre famille à lui. Cauchemar est né en France. Moi je n’y suis jamais allée, car mon géniteur a bien sûr préféré tout préparer le beau voyage pour mon ex-mari et sa nouvelle copine. Pauvre idiot. Je me suis plutôt sentie bien débarrassée de ne pas devoir connaître personne d’autre dans son genre.

J’avais vingt ans. J’étais maintenant libre de vivre enfin ma vie. Mais j’avais tellement de colère accumulée en moi et j’ignorais totalement quoi en faire. Je me sentais complètement perdue, en ne comprenant toujours pas que tout ce que je venais de vivre était loin d’être normal. J’ai fait de nombreuses tentatives de suicide, sans le dire à personne ou à très peu après coup, en me réveillant dans des marres de pilules, sans même me souvenir à quel moment je les avais régurgitées. Les oreilles me bourdonnaient ensuite pendant au moins une semaine.

J’ai aussi développé un sérieux problème de boulimie. Il m’arrivait de me faire vomir jusqu’à 5 à 6 fois dans une même journée. Ça a duré aussi longtemps que mes idées suicidaires. Je ne pensais jamais m’en sortir.

Étrangement, je crois que les gens autour de moi ne se rendaient compte de rien. Il faut dire que j’étais déjà habituée de jouer la comédie, c’est-à-dire de parvenir à feindre que tout va super bien quand en réalité, c’est le gros bordel.

Comme j’étais complètement perdue, je n’ai pas non plus rencontré un homme digne de ce nom là, car on peut facilement le deviner, j’étais devenue très agressive envers tous les hommes. Les seuls qui ont réussi à m’approcher à cette époque étaient extrêmement manipulateurs et fort peu recommandables.

Je me souviens d’une nuit où j’étais couchée sur le plancher de ma petite cuisine sur l’Avenue d’Orléan à Montréal. J’avais vidé des paquets de bouteilles de pilules et elles roulaient tout autour de moi. Mes oreilles s’étaient déjà mises à bourdonner. J’ai alors vu mon charmant copain de l’époque, qui m’a enjambée pour aller à la toilette… pour ensuite aller se recoucher dans mon lit, comme si de rien n’était.

Lorsque j’ai voulu le quitter, il me faisait de fausses menaces de suicide en croyant que ça ferait baisser ma garde. Le pauvre… il ignorait à quel point j’avais de l’endurance et le nombre de tours dans mon sac. J’ai échafaudé un plan en appelant son frérot préféré, afin que toute sa famille l’attende à la porte quand je suis allée y déposer le roi. Une semaine auparavant, il avait eu le culot de me mettre un doigt près du visage en me gueulant après, parce que monsieur exigeait que je lui laisse encore ma voiture. Je lui avais précédemment prêtée à plusieurs reprises, mais il l’avait toute poquée en se rendant à la pêche au bout du monde. Quand j’ai vu sa main près de ma figure, ma réaction a été de… lui ramasser la face ainsi que ses lunettes qui ont revolé jusqu’à l’autre bout de ma cuisine.

Lui donner une claque au visage, ce n’était pas brillant de ma part. Cette histoire aurait pu bien mal finir, mais comme j’étais suicidaire et que je me battais avec le diable toute les nuits dans mes rêves, c’est la première idée stupide qui m’est venue.

Sa royauté est restée tellement surprise, qu’il s’est totalement figé… et s’est mis à rire nerveusement en me traitant de folle. J’ai utilisé tout mon petit change afin de reprendre le contrôle de moi-même car le nono ne semblait vraiment pas comprendre que mon futur projet spontané, c’était de le faire passer bar en bar de ma fenêtre. J’ai réussi à me calmer en ajoutant seulement : non, tu n’auras plus jamais ma voiture. Ensuite, j’ai passé une semaine à jouer à l’hypocrite en lui volant mes clés de maison dans ses poches, en paquetant moi-même ses valises tout en lui disant qu’on resterait longtemps chez ses parents… mais quand j’ai été rendue devant chez lui et à bonne distance de 3 heures de route de chez moi, j’ai ouvert les portes, et je lui ai dit que le voyage dans « le carrosse » était maintenant : terminé. Puis inutile de me faire une autre scène, ta famille est là dans la fenêtre qui nous regarde.

J’ai longuement rencontré des hommes dont l’unique but dans la vie était de se mettre sur le B.S. Ce qui me confondait, c’est que cauchemar avait toujours été un homme d’affaire très travaillant et je craignais tous ceux qui étaient trop ambitieux comme lui. D’ailleurs, le sosie de cauchemar m’avait tout autant dégouttée alors j’avais de très mauvais points de repère à ce niveau également.

Bon sang que j’étais dure avec moi-même. J’ai enduré plusieurs relations complètement malsaines pendant de longues années, tout ça parce que je ne voulais pas être seule. Cauchemar me considérait encore davantage comme une « maudite haïssable » depuis que j’avais eu le culot de quitter son sosie. Je comprends maintenant avec des années de recul que je désirais avoir un copain à tout prix en majeure partie pour lui prouver que j’étais quelqu’un de bien.

Mais quel homme « normal » aurait bien pu vouloir de moi? J’étais totalement malheureuse et suicidaire, alors j’enchaînais plutôt les désastres amoureux, un après l’autre. Car mon gros problème, c’est que je croyais que j’étais vraiment une « maudite haïssable ». Je n’avais aucune confiance en moi et je pensais sincèrement que je ne valais absolument rien. Lorsque je voyais des problèmes, j’avais très peur de m’affirmer, alors j’attendais d’atteindre un seuil limite maximum d’endurance. Lorsque la confrontation devenait inévitable, ça me prenait tout mon petit change car le problème était devenu gigantesque. Même si j’étais témoins que ma propre vie s’en trouvait améliorée après coup, je ressentais toujours une culpabilité monstrueuse d’avoir osé me « fâcher ».

J’étais très malhabile pour me protéger, je n’avais jamais appris comment me défendre, en plus d’être toujours seule pour le faire.

Vers l’âge de 22 ans, j’ai travaillé l’été à l’usine de cauchemar afin de rejoindre les deux bouts en poursuivant mes études. Comme j’étais devenue franchement suicidaire, j’osais le confronter de plus en plus. Étrangement, ça lui a un peu cloué le bec. Nous avons eu plusieurs altercations et j’ai mis fin abruptement à ce travail le jour où j’ai appris que cauchemar me faisait travailler pour son sosie sans me le dire. J’étais dégoûtée.

À l’université, il ne me restait que quelques crédits à obtenir pour graduer mais j’étais totalement épuisée. J’ai décidé d’abandonner quelques cours en bout de piste car je ne désirais pas voir ma moyenne de 88.9 % réduite à néant. Petit miracle, les meilleurs compositeurs de l’université, tous âgé de plus de dix ans que moi, m’ont offert au même moment de partager un studio d’enregistrement avec eux dans le vieux Montréal. J’ai tout de suite accepté, même si de ne pas obtenir mon diplôme après avoir travaillé si fort toutes ces années me brisait le cœur. Mais je devais avant tout me battre pour redonner un sens à ma vie et retrouver enfin le goût de vivre; je l’avais totalement perdu.

Un jour au studio, je suis arrivé pour ma session et un de mes collègues compositeur me regardait étrangement. Mais j’ai su ce qui le dérangeait : il avait entendu cauchemar parler à une émission de radio. Le sosie de cauchemar a gagné plusieurs prix dans le style « meilleure entreprise »  à cette époque, et son sosie remerciait cauchemar qui lui avait bien sûr avancé des vingtaines de milliers de dollars au départ. Le journaliste a interrogé cauchemar sur les raisons de sa générosité spectaculaire, et mon géniteur ne s’est pas gêné pour dire publiquement que c’était son gendre, mais que sa fille l’avait quitté, car ses études lui avaient monté à la tête…

Le soir même, j’ai englouti une autre bouteille de pilules accompagnée de Jack Daniel.

Je n’ai jamais bu en public, car je détestais perdre mes repères parmi la foule, même en présence de quelques amis. En fait, seulement toute seule ou en compagnie de mon amie d’enfance ou de mon copain. Mais j’admets qu’à cette époque, j’avais de fortes tendances alcooliques, ne pouvant oublier dans mes armoires une bouteille d’alcool qui n’était pas terminée. Un verre parvenait à me détendre et m’enlever un peu de stress, sans jamais réussir à me calmer et me faire oublier mon mal de vivre, et ainsi de suite. Par chance, j’ai toujours détesté l’effet de la tête qui tourne car ça ressemble trop aux étourdissements que causent les claques par la tête alors je me suis vite assagie avec l’alcool.

J’ai aussi passé tout un après-midi chez moi avec une lame de rasoir à laquelle j’avais facilement accès grâce à mon studio d’enregistrement du vieux Montréal. C’était l’époque des enregistreuses à bobines où tous les montages se faisaient en tailladant le ruban magnétique. Je n’arrêtais pas d’imaginer la propre peau de mes poignets… une chance que j’ai trouvé que du sang, c’est très rouge et salissant.

En plus d’avoir beaucoup d’élèves intéressants, j’ai eu la chance d’obtenir un poste d’organiste à NDJ à temps partiel. Un grand orgue à trois claviers situé au balcon arrière, en plus d’un piano à queue sur le premier plancher en bas de l’autel, dans un bâtiment phénoménal avec une acoustique hallucinante. Il y avait toujours plusieurs cérémonies de suite qui valaient bien le déplacement. De plus, mon compositeur préféré est Bach et toutes ses œuvres magistrales s’y prêtaient à la perfection, tellement que je n’oublierai jamais cette formidable expérience musicale. C’est bien dommage que la religion et les curés m’inspirent autant de mépris, car depuis plusieurs années, j’ai décidé de ne plus jamais jouer dans les cérémonies religieuses des églises. Entendre des sermons et des incantations, en sachant que c’est écrit dans le nouveau testament que les femmes doivent se taire et être soumises, ça me donne trop le goût de hurler des grosses bêtises. Et ce n’est pas l’endroit…

En 1990 à 24 ans, premier gros miracle et fameux coup de théâtre : cauchemar a quitté ma mère pour une autre femme!!!

Ça aurait été bien trop beau que tout se termine simplement ainsi. La journée suivante, sainte maman était couchée sur son divan en ayant du mal à respirer, même si j’avais beau lui expliquer qu’elle s’en remettrait bien vite et que l’autre femme serait bien mal prise avec ce fou là. J’avais plutôt envie d’ouvrir une bonne bouteille de mousseux, mais ça ne la faisait pas rire du tout. Elle avait tant enduré de misère pour que son mariage fonctionne, qu’elle n’arrivait pas à concevoir que tout se terminerait de cette manière là.

Ma mère n’allait vraiment pas bien, elle faisait une terrible dépression, tout en refusant d’aller consulter un psychologue. Toute sa vie, elle a répété devant moi : « il va me faire mourir ». Là, elle était même prête à se laisser mourir. Mais moi j’avais la ferme intention de ne pas la laisser faire.

Le même jour, cauchemar a vraiment dépassé les bornes. Je venais d’expliquer à un inspecteur des bâtiments qu’on devrait reporter sa visite à cause de la santé de ma mère. Peu de temps après, voilà que cauchemar arrive à la porte avec l’inspecteur, en voulant entrer dans la maison comme si de rien n’était, contre la volonté de ma mère.

J’ai répondu à cauchemar qu’il venait de faire des choix en quittant ma mère, il vivait même déjà ailleurs, donc il n’était plus « chez lui ». J’ai réexpliqué à l’inspecteur les raisons et refourni une date, tout en entendant cauchemar me traiter de folle devant l’inspecteur.

L’inspecteur était vraiment très mal à l’aise alors il s’est vite sauvé et cauchemar l’a heureusement suivi. Peu de temps après, ma mère m’a demandé une commission qui se trouvait juste à un endroit bien précis…

Je me suis dirigée vers le bâtiment prêt de la maison familiale où cauchemar y entreposait des machines de fine pointe pour son usine. En entrant, j’ai complètement oublié la commission de ma mère puisque je suis tombée sur un méga long marteau à grosse tête. Je l’ai saisi, et j’ai vu rouge.

J’ai tapé pendant au moins 10 minutes sur la plus précieuse machine de cauchemar qui servait à alimenter toute sa grosse usine.

Bon yeu que j’ai frappé fort. J’avais tellement de colère accumulée, que j’ai même réussi à arracher le gros fil électrique gainé du plafond sans m’en rendre compte. À chaque coup, je me disais : cauchemar adore ses machines, bien je vais lui faire goûter à sa sauce. Tiens-toi, tiens-toi, pis tiens-toi encore. J’ai arrêté quand je n’ai plus rien vu à casser.

Après coup, je ne me suis pas trouvée très brillante. Puis j’avais très peur des conséquences. Je suis retournée à la maison, et j’ai raconté tout ça à ma mère car je désirais la prévenir de ce qui m’attendait. Elle s’est enfin mise à rire de tout cœur. « T’as pas fait ça? » Puis elle riait de plus belle. « Non mais t’as pas fait ça? » Bien oui maman… « T’as vraiment tout cassé sa machine? » Mets-en.

Peu de temps après, j’ai vu cauchemar arriver vers la maison, les deux bras éloignées du corps et les mains en poings. Mais j’étais prête. Je m’en foutais pas mal qu’il appelle les policiers pour me mettre en prison. Parce que s’il faisait ça, moi aussi, je dirais tout ce qu’il nous a fait subir depuis ma naissance. Je savais qu’il le savait, alors j’ai compris qu’il s’en venait pour se battre avec moi. Ma colère a soudainement quintuplé, même « millionituplé ».

J’ai ouvert la porte. Il est entré en me gueulant après. Vous dire à quel point j’étais suicidaire, c’est que je l’ai regardé avec des couteaux dans les yeux en lui répondant : « pauvre toi… bien au lieu de faire suer le peuple ce soir, oups, tu devras réparer ta machine! »

Cauchemar est resté tellement bouche bé, qu’il est tombé à genoux en se pognant le cœur à deux mains. Je lui ai demandé s’il avait besoin d’une ambulance. Il s’est vite levé en repartant, tout en me traitant de maudite folle encore une fois.

J’avoue que cette fois là, j’ai vraiment couru après ma mort, c’est certain. Mais à partir de cet instant, lorsque je rêvais encore la nuit que je me battais contre le diable, j’arrivais dorénavant… à lui casser la gueule, vrai de vrai!!!

Le plus triste dans cette histoire, c’est que peu de temps après cela, sainte martyre ne pouvait pas encore se passer de cauchemar. Flûte de flûte. Cauchemar s’est à nouveau retrouvé dans le décor, puis au bout d’un moment, ma mère l’a enfin imploré de partager plus équitablement une partie de leurs biens, soit de mettre à son nom à elle leur maison familiale ainsi que le terrain du commerce, tout étant zoné ensemble par le ministère de l’agriculture.

Le studio d’enregistrement que je partageais avec mes collègues compositeurs a déménagé dans la petite Italie. Lors de la construction, cauchemar s’est offert de venir nous aider à la menuiserie. Ça me déplaisait car je savais qu’il se venterait de ça par la suite, mais je me suis dit que de toute façon, il donnerait tout ce temps là à son sosie alors pourquoi ne pas en profiter. J’ai en mémoire un bout cocasse où un des trois compositeurs a échappé un deux par quatre qui est tombé… sur la tête de cauchemar. Tout en me tenant très loin des regards de la bête bien sûr, je n’ai pas pu m’empêcher d’attraper un gros fou rire. Mon collègue n’en finissait plus de s’excuser de sa maladresse… tandis que moi j’avais tellement envi de répliquer : « t’en fait pas, c’est juste arrivé à cause de la loi du Karma et des vies antérieures de cauchemar… »

Un jour, ma mère m’a fait une offre inattendue. J’avais 25 ans et elle désirait que je quitte Montréal pour revenir vivre près d’elle. Ma mère s’était débattue de toutes ses forces contre cauchemar et son sosie pour récupérer la maison de mon défunt mariage, propriété qu’elle avait d’ailleurs elle-même toute payée au départ, mais elle n’avait pas eu le choix de rembourser une seconde fois la valeur de cette même maison pour remplir les poches du sosie de cauchemar afin qu’il se décide enfin à partir. Cette petite maison faisait maintenant partie des possessions de ma mère, étant sur le même zonage agricole.

Elle venait aussi de donner à ma grande sœur deux propriétés d’égales importances. Moi je n’en serais pas la propriétaire à cause du zonage, mais ça me tentait vraiment beaucoup.

À cette époque, j’avais un petit appart à Montréal que j’adorais, j’enseignais dans plusieurs consulats de l’ouest de la ville et j’avais beaucoup d’élèves avec un standing très enviable, même des aviateurs. Certains d’entre eux étaient très généreux avec moi et me donnaient même leurs places à l’opéra lorsqu’ils étaient absents. Je me suis aussi liée d’amitié avec certaines familles qui étaient franchement des anges. Ils m’invitaient à des soupers grandioses, où le repas arrive dans des gros frigidaires portés par des cuisiniers portant la fameuse coiffe blanche. L’architecture des consulats était très impressionnante, et ils étaient parfois remplis de tapisseries et d’objets anciens magnifiques, quelques un datant même du moyen-âge. Ça me rappelait évidemment le fameux château de Moulinsart de Tintin…

J’appréciais toujours autant mon studio d’enregistrement et mes collègues compositeurs étaient tous les trois vraiment hots, régulièrement dans des lancements de pièces de théâtre ou des productions de danse et à côtoyer des tas de vedettes connues. J’étais souvent invitée à tous ces événements, et ça me faisait voir la vie sous le bon angle de la créativité, où tout est toujours possible, où il faut constamment réinventer la roue pour parvenir à se démarquer. Le milieu de la musique contemporaine est fascinant.

Par contre, je n’ai jamais apprécié toute la « crème fouettée artistique » où il s’agit d’épater la galerie au lieu de livrer de vraies émotions. Ce qui me touchait avant tout, c’étaient les œuvres toutes simples qui veulent vraiment dire quelque chose. Alors malgré mon beau studio à la mode, je préférais passer du temps toute seule chez moi devant mon piano, à écrire des chansons qui me faisaient vraiment du bien, sans que j’aie même le désir de les présenter à personne, à part quelques bons amis. J’avais bien sûr très peur que les critiques extérieures démolissent le peu qui restait de moi…

Et puis j’aimais beaucoup ma mère et je craignais toujours que cauchemar la maltraite. J’adorais l’emplacement magnifique de cette maison et… je répète que j’étais vraiment suicidaire, alors j’ai dit oui.

Cependant, un de mes confrères de travail était très fâché de mon départ du studio et un jour, il m’a lancé un cendrier en me traitant de tous les noms. Son imagination de compositeur a même un peu trop débordée. J’ai eu un bon choc nerveux et j’ai failli avoir plusieurs accidents de voiture en sortant de là car je tremblais et je pleurais démesurément. Je crois que cet événement a fait remonter en moi beaucoup de flash-back de mon passé. J’ai ressenti rapidement beaucoup de colère et pour la première fois de ma vie, j’ai osé porter plainte à la police de Montréal. Tout s’est déroulé assez facilement et l’individu n’a rien nié du tout rendu à la cour. On s’est même revu à la fin du « 810 » qui a duré un an, et il a eu l’intelligence de s’excuser.

Je suis donc revenue habiter ma région natale en 1991. Ma mère m’a offert que je dessine mon propre plan d’allonge pour mon studio et mon école de musique. Cela impliquait cependant que cauchemar y travaille un bon moment pour la construction. Je me suis dit qu’il me devait bien ça.

Cela a encore bien sûr donné lieu à quelques bonnes altercations avec cauchemar car durant la construction, il voulait m’imposer chez moi des employés de son sosie. Pas question. Ensuite, il s’est mis à dénigrer constamment ma mère dans son dos lorsqu’il se retrouvait seul avec moi, en la traitant de « vieille haïssable », entre autres qualificatifs non moins affreux. Je défendais ma mère du mieux que je le pouvais, en mettant une fin abrupte aux discussions pour toutes sortes de raisons que je m’inventais au fur et à mesure.

Malgré tout cela, je l’appelais encore « papa », car j’avais toujours encore peur qu’il explose n’importe quand. Tous les gardes fous de ma région ont d’ailleurs connu les couleurs de peinture de ses carrosseries. Il nous racontait en riant ses sorties de route… sans jamais se presser pour faire les réparations de ses véhicules. De toute façon, de voir la vitesse à laquelle il les rebossait toujours à nouveau, c’était inutile.

À cette même époque, j’ai fréquenté un bon moment un de ses employés ex-détenus qui était venu travailler chez moi à la peinture. Pourquoi je n’en ai pas eu peur? Parce que ce gars était visiblement plus brillant et sensible que cauchemar, et de plus, j’essayais de comprendre pourquoi cauchemar l’aimait tant. Mon géniteur parlait de ses ex-détenus avec un respect que je ne lui avais jamais connu, surtout pas envers nous. Quand ce gars a tout cassé chez moi car son frère avait perdu son travail à l’usine de cauchemar, tout a été clair. Cauchemar l’aimait beaucoup, car il lui ressemblait beaucoup, tout simplement.

Le plus fou, c’est que ce soir là, ce gars voulait aller casser la gueule de cauchemar et c’est moi qui l’ai retenu en le faisant boire jusqu’à ce qu’il tombe. À cette époque, j’avais bien trop peur que cauchemar le tue. Ce gars là ne savait pas du tout à quoi il s’attaquait, et j’avais bien eu assez de voir ma mère et ma sœur passer par là auparavant. J’ai très bien fait, car je ne crois pas du tout aux représailles physiques hors du contexte de la légitime défense. Ça ressemble trop à un manque flagrant de bon raisonnement.

J’ai dû porter plainte contre cet individu peu après qu’on se soit quittés car il est devenu très violent. Mais lui aussi n’a rien nié et ses antécédents judiciaires ont facilité les choses. Les policiers de ma région ont très bien fait le suivi de ce dossier, et je me demande si ce n’est pas parce que j’étais alors la fille d’un homme riche. Les policiers étaient aux petits soins avec moi, même que rendue à la cour, il y en avait deux qui m’entouraient de leur présence rassurante.

J’avoue que je n’ai pas du tout détesté ça. Même que pour la première fois de ma vie, cette situation où j’étais bien protégée ressemblait enfin aux belles histoires de mon Tintin. Étrangement cette journée là, cauchemar s’était aussi rendu à la cour. Alors je ne pouvais pas m’empêcher de me dire… « si ces deux policiers savaient que cauchemar est encore plus fou que l’autre, que feraient-ils? »  Car l’ex-détenu bien sûr, ne m’avait fait vivre que le millionième de la violence de cauchemar.

Ma mère a été diagnostiquée d’un cancer de l’utérus phase deux et des ovaires phase trois en mai 1994, j’avais alors 28 ans. Cauchemar lui a bien évidemment conseillée de ne pas suivre de chimio et de s’auto-guérir. Il a même eu le culot de lui « imposer les mains » en lui disant qu’il l’avait guérie car c’était un autre « beau message » de Dieu!!! J’ai vivement dit à ma mère : « Es-tu folle? Avec les mêmes mains qu’il nous bûche dessus? Veux-tu bien dire : ces mêmes mains là? Moi c’est mon pied au cul que je vais finir par lui imposer à lui pour le guérir!!! »

Je suis certaine qu’il voulait qu’elle meure. Après toutes les bêtises qu’il disait d’elle dans son dos depuis des années, je vous jure que ce n’est pas « Dieu » qui inspirait cauchemar, loin de là.

Ma mère a heureusement accepté de suivre toute sa chimiothérapie afin de mettre toutes les chances de son côté. Depuis son diagnostic de cancer, j’ai entrepris de l’appeler tous les jours afin de ne jamais lui laisser broyer des idées noires. Je l’ai encouragée à prendre soin d’elle-même du mieux que j’ai pu, car elle n’y était pas du tout habituée.

À ce moment là, ma mère se sentait extrêmement fragile et pour cause. Elle a alors insisté pour que je fasse partie du conseil d’administration de la compagnie de cauchemar. Elle en était vice-présidente, ma sœur trésorière, et moi secrétaire. Cependant, ces titres ne représentaient rien à l’époque, ni au revenu financier, ni en charge de travail. J’ai donc accepté, sachant que cela faisait énormément plaisir à ma mère.

Ma sœur lisait encore tous les mêmes livres que cauchemar. On n’avait toujours pas beaucoup d’affinités, elle voyait les auras et disait la bonne aventure. J’ai passé encore des années à mendier son attention. Je lui faisais des mégas gâteaux de fête, elle oubliait pourtant presque toujours la mienne. Elle me racontait souvent que mon aura était toute noire et pleine de pics… mais étrangement, quand elle était de bonne humeur, elle me disait le contraire.

Cette histoire d’aura noire et piquante me faisait quand même très peur. Mais de toute façon, je me sentais en permanence vraiment très mal dans ma peau et toujours découragée de la vie. Ça m’a cependant fait écrire quelques belles chansons et je me suis classée dans plusieurs concours comme auteur-compositeur-interprète. Mon école a eu une liste d’attente dès la troisième année, et plusieurs de mes élèves se sont mis eux aussi à se classer dans des concours locaux et provinciaux. Toutes ces petites réussites m’ont beaucoup solidifiée en tant que femme, et je me suis mise à m’amuser vraiment bien toute seule.

Car de plus en plus, je me sentais mal en présence de beaucoup de gens. Je n’étais bien que chez moi, sans personne autour, avec mon système d’alarme et mes portes bien barrées.

Loin de moi l’idée d’avoir des enfants et j’ai toujours fait très attention de ne pas en avoir. Avec mon passé de violence, comment j’aurais pu faire confiance à un homme à ce point là? Et tout au long de ma vie, je ne me suis jamais sentie en réelle sécurité nulle part. Comment protéger un enfant quand on a du mal à se protéger soi-même?

Puisque ma vie professionnelle allait assez bien, j’ai dès lors attiré quelques hommes de plus en plus intéressants, tout en devenant vraiment très rapide à les expédier sur les roses au moindre gros problème. Je ne voulais pas des hommes violents, mais pas plus d’un homme qui se drogue, ou qui désire un harem, ou qui ne s’occupe pas bien de ses enfants, ou qui boit trop, ou qui a le don d’inventer d’autres vices. Je n’en reviendrai jamais de la panoplie de bozos qui existent en ce monde.

À 31 ans en avril 1998, j’ai suivi un cours technique pour aider ma mère dans son travail de la compagnie. Cela impliquait que cauchemar vienne une fois chez moi dans mon bureau m’enseigner certaines choses. Il est vite devenu très impatient et a poussé violemment ma chaise. Je lui ai demandé de partir de chez moi.

Naturellement, les hommes équilibrés que j’ai connus m’adoraient lorsque tout allait bien. Mais aussitôt que je pleurais, je les ai tous vu détaler comme des lapins. Ça m’a toujours tournée complètement à off. Ils me retéléphonaient tous rapidement, je les congédiais encore plus rapidement.

J’étais déjà très mal entourée au niveau « familial », alors j’ai au moins chassé de mon entourage tous ceux qui ressemblait à des problèmes sur deux pattes ou à des gros bébés. Mais je croyais toujours faussement que pour ma propre « famille », je n’avais pas le choix de tout endurer…

Lorsque je travaillais au bureau chez ma mère pour lui aider dans la compagnie avec le nouveau cours technique que j’avais suivi, pas une fois cauchemar n’entrait en nous disant bonjour. Il arrivait toujours en chialant, nous stressant au maximum, en exigeant tout comme un roi, sans ne jamais dire merci. Plus ma mère récupérait de son cancer, plus il lui en redemandait à tous les niveaux. Je n’en pouvais plus d’être témoin de cette situation pitoyable, alors j’ai quitté définitivement ce travail pour ne me consacrer qu’à mes propres projets de musique. De toute façon, c’était même plus avantageux pour moi monétairement. J’ai également songé retourner vivre à Montréal et tout recommencer ma vie encore à zéro. Mais je ne parvenais pas à me décider de laisser ma mère seule avec ce fou là en sachant qu’il la ferait crever à petit feu.

En été 2000, cauchemar a même décidé de s’acheter une roulotte près de son commerce afin de pouvoir découcher quand ça l’arrangeait. Ainsi, il pouvait faire d’autres pressions sur ma mère aussitôt qu’elle le contredisait. Il grossissait toujours son commerce, sans aucune considération pour les supplications de ma mère en rémission d’un cancer phase trois. Bien sûr, là il a enfin décidé de se munir d’une clé de maison, pour entrer et sortir à sa guise même au beau milieu de la nuit. Ça stressait beaucoup ma mère, elle qui a toujours fait de l’insomnie, elle n’arrivait même plus à fermer l’œil, dormant même sur le divan afin de savoir si c’était lui ou un intrus. Cauchemar s’en foutait totalement de lui faire vivre toutes ces angoisses.

J’appelais encore ma mère tous les jours car j’étais très inquiète d’elle. Mais je ne pouvais pas accepter qu’elle se sacrifie autant pour cauchemar et plus la compagnie grossissait, plus elle en avait sur le dos. Un triste jour, un des ordinateurs que je connaissais bien donnait beaucoup de fil à retordre à sainte martyre. Ça m’a brisé le cœur, mais j’ai fini par oser lui dire que c’était son problème, et cauchemar avec.

Elle avait le droit de faire ses choix de vie, mais moi aussi.

Mais oh… second miracle, cauchemar s’est vite remis à dévier follement de ses railles, au point qu’au début de novembre 2000, ma mère a enfin accepté de le quitter définitivement malgré tous les jolis principes de mariage auxquels elle tenait tant. Ce jour là, malgré que ma mère était à nouveau bien mal en point, je me suis quand même offert toute seule une belle petite bouteille de mousseux… et je me souviens avoir trinqué « à la vie ». Car je savais que cette femme intelligente réaliserait bientôt combien elle serait heureuse sans ce sans cœur là.

TROP, C’EST TROP!

Quelques mois auparavant, j’avais presque 34 ans, cauchemar est venu chez moi dans mon entrée, pour exiger des choses de moi et de ma mère, avec beaucoup de violence. Il désirait maintenant faire des emprunts de plusieurs millions. Ça n’avait aucun sens car de un, ma mère était en rémission d’un cancer phase trois, et de deux, ses chiffres d’affaires n’arrivaient pas du tout. Ma mère et moi avions le pouvoir de bloquer ses empreints sur le conseil d’administration. Cauchemar est alors devenu très dangereux.

Pendant qu’il me faisait des menaces, j’enlignais discrètement mes gros chandeliers en laiton, sauf qu’il y en avait un des deux également de son côté. Cauchemar avait les yeux pleins de hargne, les mains éloignées du corps comme pour me sauter dessus. Il est parti en faisant spiner ses pneus : il y avait des traces de 4 pieds de long dans mon stationnement.

Mais je pense que le pire pour moi de ce fichu moment là, c’est quand je l’ai entendu me dire que si j’étais seule, c’est parce que j’étais une « maudite haïssable » et que j’empêchais de vivre mes tchums… et lui avec.

Non mais… quel salaud. C’est lui qui a voulu m’empêcher de vivre dès ma naissance, et sûrement pas le contraire!!! J’ai quitté son sosie adoré parce qu’il avait frappé à coup de poing à côté de ma tête, en plus de me pisser dessus, entre autre. J’ai quitté son employé ex-détenu à cause de sa violence excessive. Mais bien sûr, comme cauchemar lui-même travaille à ma mort depuis ma naissance sans réussir, il aimerait bien que je laisse ses bons petits amis lui aider un peu? Cauchemar savait très bien que ces paroles extrêmement méchantes et cruelles étaient pour me blesser au plus haut point.

J’ai appelé ma grande sœur pour lui raconter tout ça. Elle a convenu avec moi que c’était inacceptable, mais quand je lui ai demandé pourquoi elle continuait de prendre le parti de cauchemar, elle m’a raccroché la ligne au nez…

J’étais complètement anéantie et effrayée. Je savais que les menaces de cauchemar étaient bien réelles et la nouvelle comptable de la compagnie en a ajouté. Elle nous a appelées chacune notre tour ma mère et moi pour nous dire : « faites attention, il engage des ex-détenus et ces gars là peuvent venir vous tuer ». En 2003, mon avocate a fait avouer ces paroles criminelles à la comptable, elles sont supposées figurer dans les minutes de ce procès au civil. Si ça ne coûtait pas si cher de les obtenir, j’en aurais fait la demande depuis longtemps. Car bien sûr, les policiers et la couronne n’ont pas estimé que c’était leur propre devoir de le faire.

Ma mère et moi avons accepté immédiatement de quitter le conseil d’administration. Parallèlement, ma mère a décidé de tout mettre à mon nom les propriétés qu’elle possédait afin de se protéger d’une éventuelle faillite de cauchemar. Une chance pour elle, car cauchemar s’était mis en tête de voler à ma mère tout ce qu’elle possédait.

Peu de temps après en novembre 2000, cauchemar est arrivé de force avec un de ses employés chez ma mère dans son bureau lorsqu’elle était seule, sans prévenir, avec des paquets de boîtes de carton. Elle travaillait chez elle à la tenue de tous les livres depuis des dizaines d’années. Mais pour la remercier, cauchemar l’a plutôt congédiée sans avertissement, en exigeant sur le champ qu’elle mette tous les papiers de la compagnie dans les boîtes, pour les transmettre à sa nouvelle alliée, la comptable qui nous avait transmis des menaces de mort quelque temps auparavant. Ma mère n’avait pas le choix, elle leur a répondu qu’elle le ferait et que tout serait prêt le plus vite possible, alors cauchemar et son acolyte sont partis. Puis elle m’a téléphonée immédiatement en état de choc.

Ma mère s’est retrouvée encore allongée sur son divan et je croyais devoir faire venir une ambulance. Ça lui a pris au moins une heure à retrouver sa respiration et le fil de ses idées. Depuis sa grosse chimio, sa tête bouge déjà toute seule lorsqu’elle est fatiguée alors… imaginez avec tout ce stress là.

C’était carrément une intrusion grave dans le bureau et la maison de ma mère. C’était aussi la preuve que les menaces de la comptable étaient bien fondées : cauchemar s’est effectivement servi d’un de ses employés pour humilier ma mère et lui faire peur, dans sa propre maison, sans aucune pitié! Pour une deuxième fois consécutive, j’ai évalué rapidement qu’il était bien trop dangereux pour nous de dire « non » à cauchemar. Tout ça était tellement débile, que je me suis dit : bon débarra, la comptable ne sait pas ce qui l’attend… elle ne rira pas bien longtemps. J’ai aidé ma mère à paqueter les boîtes, et c’est là qu’elle a eu la brillante idée d’y mettre aussi… toutes les affaires personnelles de cauchemar. Pas trop tôt.

J’ai assisté ma mère lorsque cauchemar est venu chercher toutes les choses. Ça s’est passé assez rapidement car j’avais déjà enligné les boîtes sur le bord de la porte pour éviter des problèmes. Quand tout a été fini, il est resté planté là à attendre je ne sais pas quoi… une médaille peut-être? Alors je lui ai dit en souriant : « bonne chance », car je savais bien que ma mère était la principale responsable des grosses réussites de son commerce et qu’il venait de perdre bien plus qu’elle. Il a tourné les talons vite fait.

Je me souviens que j’ai dit à ma mère : « souris, ton cancer est enfin parti! » et ça l’a fait rire. Comme elle n’a jamais su conduire, j’étais déjà habituée de lui faire plusieurs courses alors je l’ai totalement prise en charge dès qu’elle s’est retrouvée seule. J’ai veillé à ce qu’il ne lui manque jamais rien en lui faisant toutes ses commissions, tout en l’encourageant toujours à prendre soin d’elle-même et à devenir plus forte mentalement. J’ai entrepris avec elle un beau ménage de sa maison et j’ai travaillé à la décoration de plusieurs pièces afin qu’elle s’y sente bien. J’ai cru un moment que le pire était enfin terminé et que nous pourrions dorénavant vivre en paix, une paix bien méritée.

Mais ce n’était que le début du véritable enfer. Même après ces deux exigences démesurées et très graves de conséquences pour ma mère, cauchemar avait encore en tête les actions qu’elle détenait dans la compagnie. Ma mère en possédait pour des centaines de milliers de dollars. C’est la nouvelle comptable de cauchemar qui les voulait, son nouveau titre étant la « contrôleur » de la compagnie, ainsi que tous ses nouveaux employés auxquels il promettait mer et monde.

Maudit bordel.

J’ai trouvé le courage de retéléphoner à mon ex-sœur en février 2001 pour lui demander une dernière fois son aide, au cas ou elle aurait enfin pitié de notre mère et de moi. Rien à faire. Elle s’est plutôt plainte de notre mère et que cette dernière… l’avait abandonnée! Quoi? C’était totalement faux et complètement la situation contraire : c’est elle qui abandonnait notre mère aux griffes de cauchemar! Peu après la rupture de novembre 2000, elle n’est même jamais retournée la visiter une seule fois, ni l’appeler pour lui demander si elle a besoin de quelque chose! Et quand je lui ai dit que j’étais rendue à suicide secours, elle a répondu avec un sourire dans la voix : « ha! », sur un ton qui voulait dire : tu le mérites. Ce fut notre dernière conversation à vie, car elle m’a tournée complètement à off et je ne suis vraiment pas masochiste.

Ma mère s’est retrouvée en phase de dépression majeure. J’avais beau essayer de lui redonner le goût de se relever, elle restait des journées entières dans son lit en ne sortant plus du tout de chez elle. Mon ex-sœur a même accepté de prendre une partie de l’emploi que sainte martyre venait de se faire voler impunément. Ma mère devait donc vivre plusieurs gros deuils très douloureux du même coup, en plus de son cancer phase trois qui la menaçait toujours.

Cauchemar nous a envoyé ses exigences et ses papiers d’avocats par l’entremise de sa complice « contrôleur » où il offrait une pension alimentaire à ma mère, en échange de toutes ses actions. Ma mère a refusé de se battre. Ça ne faisait aucun sens, mais le stress est le pire allié du cancer. Je ne voulais pas que ma mère meurt pour de l’argent. Pour la consoler un peu et aussi parce que je détestais cauchemar, j’ai donné à ma mère toutes les actions que moi je possédais. Elle a accepté de signer les papiers de cauchemar mais j’ai exigé auparavant que les montants des actions soient bien indiqués, car je savais que sinon, cauchemar la volerait, tout en se ventant de lui « donner » une pension alimentaire. Il faut bien comprendre que si ma mère était décédée au bout de deux mois, il lui aurait remis quelques milliers de dollars en échange de plusieurs centaines de milliers.

Bien sûr, tout le reste de la supposée famille de ma mère a également pris le parti de cauchemar. Comment résister à un millionnaire qui se pette les bretelles constamment et qui nous fait à ma mère et moi une réputation de folles? Depuis des années déjà, moi je ne fréquentais presque plus personne ni d’un côté comme de l’autre, car je ressentais toujours de gros malaises en leur présence. Alors pour moi ce fut vite réglé. Mais pas pour sainte martyre, malheureusement.

Autre coup de théâtre : le 7 mars 2001, une juge a refusé cette entente en exigeant que ma mère se prenne un avocat indépendant. Oh boy. Cela a tout de même réveillé un peu la sainte mère, qui s’est alors mise à comprendre que si une juge lui imposait d’engager un avocat, c’est que c’était vraiment grave.

Mais cette juge ne pouvait pas savoir que cauchemar est un fou dangereux… Alors je me suis mise à ressentir une frayeur permanente et tous les flash-back de mon enfance se sont mis à affluer… avec raison.

En octobre 2001, tenez vous bien, cauchemar a osé envoyer à ma mère un mot manuscrit où il y a signé noir sur blanc son prénom suivi par : « le fou ».

C’est incroyable. Et même avec toutes ces preuves là, c’est moi que les policiers ont pris pour une folle peu de temps après…

Le 6 novembre 2001, nous avons reçu par l’entremise de notre avocat suite à notre premier « non », une lettre où cauchemar et sa « contrôleur » ont écrit noir sur blanc qu’ils engagent des ex-détenus, aux prises avec des problèmes de violence en phase de dépression, avec lesquels ils entretiennent une « entraide mutuelle »… même les gars de la pègre n’oseraient pas écrire de telles choses noir sur blanc.

J’étais encore complètement effrayée. Qu’est-ce qu’on peut faire pour se protéger d’un pareil malade? Le 7 novembre, j’ai envoyé un fax à cauchemar afin que ses secrétaires en soient aussi témoins et que quelqu’un finisse peut-être par lui dire de se calmer. Puis j’ai décidé aussi de lui démontrer dans ma lettre que désormais, je ne me gênerais plus pour parler des gestes criminels qu’il m’a fait subir : « Je suis vraiment très triste et fatiguée de ta méchanceté. Tu me battais quand j’étais bébé naissant, mais maintenant, je sais parler et me défendre. Je ne me laisserai plus jamais faire et je protégerai toujours maman quand tu lui fais du mal.”

Lorsque le fax a été envoyé, j’ai commencé à ressentir tellement de peur… que c’était insupportable. J’osais défier ce fou criminel?

Je me suis retrouvée à suicide secours le 18 novembre 2001. Ils m’ont immédiatement offert l’aide d’une psychologue du CLSC (gratuitement) que j’ai acceptée. Je suis parvenue peu à peu à voir un peu de lumière au bout de ce macabre tunnel. Cette femme m’a fait comprendre en une dizaine de séances que… j’avais tout simplement le droit de vivre. Je lui ai posé toutes les questions qui me tracassaient, elle m’a répondu avec toutes les connaissances qu’elle possédait. Je me disais aussi que si quelque chose nous arrivait à ma mère et moi, cette psychologue pourrait au moins diriger les policiers sur les bonnes pistes.

Cauchemar m’a envoyée une lettre personnelle peu de temps après en réponse à la mienne. Pendant environ deux pages, il ne niait rien mais il mettait toute sa violence sur le dos de ma mère!!! Comme si c’était la personnalité de ma mère qui lui avait toujours fait perdre la tête!!! Quel malade. J’ai tout vu et tout entendu depuis toujours, et rien ne peut justifier de tels gestes déséquilibrés, surtout pas avec une sainte martyre comme ma mère. Je trouvais cette lettre tellement salle et écœurante, que j’ai allumé mon feu de foyer avec.

Ce que j’ai trouvé le plus difficile parallèlement à tout ça, c’est de voir ma mère constamment reperdre le nord lorsqu’elle parlait à des amis de cauchemar avec qui elle refusait de couper tous les ponts. J’ai eu à quelques reprises à retéléphoner au CLSC de ma région pour demander de l’aide car par moments, je ne savais plus quoi faire de miss martyre. C’est bien beau de vouloir aider quelqu’un, mais si cette personne ne réalise pas qu’elle joue avec le feu, ça devient complètement fou. J’ai même songé plusieurs fois à quitter définitivement la région car je n’arrivais plus à prendre ma mère en pitié. Mais ça impliquait que je perde mon école de musique et que je risque de me retrouver à la rue…

Est-ce qu’un beau jour, quelqu’un aura aussi pitié de moi?

Les travailleuses sociales m’ont rassurée et encouragée à chaque fois, et ma mère est devenue peu à peu beaucoup plus solide et responsable. J’ai expliqué à la sainte que j’avais mon voyage de toujours prendre sa défense depuis mon enfance et de toujours devoir me battre toute seule pour elle. Devoir endurer que des amis de cauchemar aillent chez elle pour ensuite rapporter leurs commérages à ce dernier, ou bien encore qu’ils parlent contre moi dans mon dos, c’était dangereux et inacceptable alors je n’hésiterais pas à ne plus m’occuper d’elle s’il fallait que j’en arrive à cela. Au pire, je lui ai précisé qu’elle n’aurait qu’à demander aux amis de cauchemar de la prendre en charge.

J’en veux beaucoup à tous ces gens complices de cauchemar et complètement immoraux. Une de ces personnes allait même chez ma mère en emportant de ses objets personnels tout en lui disant : « je voudrais aussi ça et ça lorsque tu vas mourir ». Sainte martyre ne répondait rien, tentant encore de se faire aimer en jouant au tapis pendant que tout le monde s’essuie toujours les pieds sur elle. Ensuite bien sûr, ma mère n’hésitait jamais cependant à me téléphoner en se plaignant d’eux toute angoissée, comme si j’étais sa ligne « martyre secours ». Pour ça, elle en avait toujours, de l’énergie.

Aye. Je suis bien prête à être la ligne « victime secours », mais si tu veux jouer à la sainte martyre, joues-y toute seule, moi je n’en peux plus. Mets donc ton énergie à te défendre face à ces gens stupides et malveillants au lieu que ce soit toujours moi qui le fasse pour toi. Par la suite, j’ai eu la bonne idée de nommer ma mère toujours par son prénom car ça me fait sentir moins misérable. J’ai accepté le fait que je dois plutôt agir avec elle comme « sa mère » plutôt que « sa fille ». C’est seulement ainsi que je parviens à lui venir en aide sans me détruire moi-même. Pourquoi je ne l’ai pas plutôt laissée tombée? Car je me sentais incapable de l’abandonner à son triste sort. Personne ne mérite de vivre ce qu’elle a vécu et de se faire maltraiter sans arrêt par un monstre et tous ses semblables.

Notre avocat au civil a répondu encore clairement « non », mais cauchemar n’en avait rien à cirer. Le 22 décembre 2001, la maudite alliée de cauchemar a envoyé une lettre personnelle à ma mère que je qualifierais de… de… je n’ai pas de mots. J’ai dû passer des heures avec ma mère aux urgences. Quel noël infernal. J’ai aussi répondu « personnellement » à cette lettre avec la bouche de mes nouveaux canons car la thérapie que je venais de débuter valait déjà son pesant d’or. Ce fut un autre « non » très ferme, agrémenté de bonnes grosses vérités bien méritées.

Oui, j’avais très peur. À tous les « non » que j’ai dû dire à cauchemar, j’ai constamment eu des peurs à me glacer le sang. Je savais que cauchemar ne lâcherait jamais prise. En effet, peu de temps après, cauchemar m’a téléphonée chez moi, parce qu’il voulait venir « me parler ».

Pas question. J’ai refusé en inventant de bons prétextes tout en acceptant de lui parler au téléphone. Car je devais absolument comprendre comment nous sortir en vie de tout ça, ma mère et moi. J’ai alors décidé d’enregistrer cette conversation car les enjeux étaient vitaux.

Sur mon enregistrement sonore du 2 février 2002, cauchemar a encore eu le culot de commencer la conversation  en me disant : « as-tu vu le beau ciel bleu »?

Non, je ne le vois jamais le beau ciel bleu, car le diable en personne se tient toujours devant, sans aucune once de remord.

J’étais épuisée, découragée, apeurée… et extrêmement consciente que la bataille serait ardue et très longue et que cette fois-ci, si je voulais m’en sortir vivante, je devais à tout prix parvenir à me tenir debout et prévoir tous ses coups bas.

Par chance, le 2 février 2002, je n’ai pas seulement obtenu une preuve sonore contre le monstre criminel. J’ai enfin tout compris, puisque j’ai été confronté à la dure réalité des choses, même si ça ne me plaisait pas du tout. Après avoir écouté et réécouté cette conversation d’une heure au total, après avoir bien entendu cauchemar et ses propos sans remords, ses réponses glaciales et immorales, ses rires, ses paroles méchantes, et ses manipulations écœurantes…

Il a encore appelé le fait qu’il m’a secouée à un mois : « un RÉFLEXE d’une seconde qui a des répercutions sur toute une vie ».

Excusez-moi, mais il me semble qu’un “réflexe”, c’est de se gratter le nez quand ça pique. PAS DE SECOUER UN BÉBÉ NAISSANT!!! Et quel genre de “réflexe” peut avoir des RÉPERCUTIONS SUR TOUTE UNE VIE???

Lorsque je lui dis que j’ai refait des tentatives de suicide, devinez quoi? Il ri… et il parle de lui-même et de son Dieu.

Il admet que ce n’est pas bon qu’il entre chez moi, et je me mets à pleurer en lui disant que j’ai peur de lui. Pour sa violence physique grave, il dit que « je répète des affaires que ça fait longtemps », qu’il a travaillé fort là-dessus et qu’il s’est amélioré beaucoup beaucoup.

Il me fait comprendre sans aucune gêne que je suis encore pour lui une « maudite haïssable ». Il admet que j’ai raison de ne pas le croire quand il me répète qu’il m’aime. Il compare les violeurs à des « daltoniens » qui ne peuvent pas voir les couleurs.

Il essaie par tous les moyens de me convaincre d’accepter ses exigences concernant les actions de ma mère. Il dénigre mon ex-mari en se plaignant que ce dernier veut lui faire faire faillite et à quel point c’est un salaud, même s’il est conscient qu’il a toujours pris la part de son sosie au lieu de la mienne…

Il dit que ma sœur est très faible, elle… avec un ton de serpent qui se vente d’avoir réussi à obtenir autant d’emprise sur elle. Puis il essaie de me culpabiliser encore et encore par tous les moyens en devenant agressif et en me mettant tous ses problèmes sur le dos, en affirmant même que ses avocats traitent ma mère de « vieille sorcière »…

Il a oublié que moi je n’ai jamais oublié… que c’est lui-même qui dit cela de ma mère, car je l’ai déjà entendu m’en parler exactement de cette manière là auparavant. C’est lui le vieux sorcier. Ma mère, ce serait plutôt une vraie magicienne d’être parvenue à l’endurer tout ce temps là sans devenir folle.

En plus, cauchemar a affirmé qu’il ne croit pas aux « lois des hommes », car c’est tout croche, c’est celui qui paye le plus qui gagne, car lui s’il engage le meilleur des avocats il peut nous planter comme il le veut… il ne croit qu’à la loi de Dieu et aux pouvoirs du pardon.

Dire que je lui ai répondu que… moi, j’y crois aux lois des hommes. Ça me rend infiniment triste et découragée, car aucunes accusations n’ont été portées contre ce monstre là, donc ils lui ont tous donné raison. Quand je pense à ça, je pleure instantanément.

Au moins, c’est la dernière journée de ma vie où j’ai appelé le diable : « papa ». J’ai enfin trouvé que « géniteur cauchemar », ça lui allait à la perfection. Je n’avais toujours pas compris durant trente cinq années que je devais voir la réalité en face et… trouver enfin le courage de lui régler son cas.

TRÈS IMPORTANT : ce qui est très clair sur cet enregistrement, c’est que le 2 février 2002, j’ai la preuve sonore que j’ai bien informé cauchemar pour des raisons plus que valables, que j’ai peur de lui et de ne pas revenir chez moi. Je lui ai même mentionné les menaces de sa comptable concernant ses ex-détenus. Le lendemain, je lui ai aussi faxé un mot pour le prévenir que s’il tentait de m’achaler encore, j’appellerais les policiers.

Donc toutes les fois par la suite où il m’a encore imposé sa présence en me téléphonant chez moi, ou en revenant dans mon entrée privée, ou en s’invitant dans mon salon avec un supposé « cadeau », ou en se rendant à un de mes spectacles d’étudiants, ou en m’envoyant un de ses employés dans ma maison sans prévenir, et ainsi de suite, C’ÉTAIT DU HARCÈLEMENT CRIMINEL.

Dans le code criminel, la définition est très claire : « agir à l’égard d’une personne sachant qu’elle se sent harcelée ou sans se soucier de ce qu’elle se sente harcelée si l’acte en question a pour effet de lui faire raisonnablement craindre pour sa sécurité ou celle d’une de ses connaissances. » « Communiquer de façon répétée, MÊME INDIRECTEMENT ».

Qu’est-ce qui n’est pas clair là-dedans?

LA TORTURE…

Le 25 juin 2002, j’ai trouvé le courage pour la première fois de porter plainte contre cauchemar et j’ai enfin appelé les policiers. J’avais une copie de mon enregistrement sonore et j’étais prête.

Jamais je n’aurais pu m’imaginer qu’une autre porte de l’enfer s’ouvrait droit devant moi. Le policier arrivé sur les lieux m’a dit tout bonnement : « les gars au poste disent que t’es folle. »

Je suis restée muette un long moment. J’ai trouvé le courage de demander qui disait cela et j’ai noté ce nom qui ne me disait rien. J’étais tellement découragée. Encore et encore seule, seule, et seule. Seule devant un monstre, depuis que je suis née. Personne pour le voir. Personne pour me voir.

J’ai su en 2007, seulement cinq ans plus tard, que ce policier était le beau frère de mon ex-soeur, un enquêteur qui ne s’est pas gêné de prendre mon dossier en main, même avec ce lien direct de parenté avec cauchemar, ce dernier ayant même assisté au mariage privé du policier. Comment ce policier a-t-il pu répéter que je suis folle? Il ne me connait même pas personnellement.

Il n’y a pas de mots pour décrire la détresse humaine. J’ai pourtant étudié en composition et en écriture, mais… les mots me manquent. Quelle horreur.

Au bout d’un court moment, je me suis inventé un autre nom de « famille » et je n’ai plus jamais signé que celui là. Se faisant, et pourquoi pas aussi un autre prénom. Cependant chez un notaire, ça passe moins bien… alors comme on m’a obligée à signer également le nom du monstre, j’ai ensuite changé de nom légalement.

Les flash-back se sont mis à affluer encore davantage dans ma tête, bien pire qu’auparavant. Mais malgré toutes les peurs et les peines que cauchemar m’a encore fait subir par la suite de mon changement de nom, je n’ai plus flanché. Bien sûr, j’ai beaucoup pleuré et… j’en ai même vomi à plusieurs reprises, tellement tout ce stress était insupportable. Mais je me suis relevée et j’ai tenu bon.

La partie « civile » de toute cette histoire était beaucoup plus facile à gérer. J’ai cherché des avocats hyper compétents car cauchemar pouvait se payer les meilleurs. Puis j’ai suivi de près tous les enjeux, car même mes avocats finissaient par se plaindre qu’il était vraiment « épuisant ». Ma mère et moi étions bien d’accord avec eux.

Suite au 2 février 2002, cauchemar m’a envoyée cinq avocats différents en ligne, toujours pour demander la même chose. Un millionnaire, dites-vous bien que ça en a beaucoup d’argent pour niaiser. Comme j’avais compris ce dont il était question et que la facture de ma mère grimpait de manière vertigineuse, je leur ai tous réglé leur cas moi-même un par un en faisant un suivi parfait au niveau de tous les documents en preuves. Au civil, il suffit d’avoir les bons arguments et de les maintenir tout en écrivant « sans préjudice » dans le coin droit en haut de la page, et le tour est joué.

J’ai aussi trouvé un petit truc pour me faire rire un peu. Les avocats adorent mettre un paquet d’abréviations après leur nom pour souligner leurs glorieux titres. Alors dans mes pages d’envoi de fax, j’ai commencé à faire suivre le nom du correspondant par de grosses insultes dissimulées et j’en mettais parfois des dizaines d’affilé, dans le style :

Adressé à : cauchemar, o.d.m.m.c.t.d.c.p.u.j.y.v.e.m.t.u.j.v.l.p.

Ça demeure un petit secret qui ne cause aucun préjudice à personne, mais ça défoule quand même en bibitte. Si vous saviez ce que ça dit…

En juin 2003, je n’en croyais pas mes oreilles : cauchemar m’a retéléphonée chez moi. Il s’est mis à se plaindre avec son ton de serpent… alors je l’ai reconnu. Je ne l’ai pas laissé finir et je lui ai raccroché la ligne au nez en lui criant que c’est un malade. En identifiant sa voix, je me suis mise à trembler comme s’il faisait moins 40 degrés Celsius avec un mal de cœur jusque dans les oreilles. J’ai vomi peu de temps après.

Je me souviens que mon copain de l’époque m’a trouvée tellement stressante qu’il m’a vite dit que tout ça était trop lourd et il est reparti aussitôt chez lui, comme si c’était de ma faute, même s’il connaissait mon lourd passé. Un autre flanc mou à qui j’ai rapidement donné son quatre pour cent!

J’admets que c’est sûrement bien plus plaisant d’avoir une copine qui a la chance d’avoir une famille normale. Sauf que ce n’est pas mon cas, et ce n’est pas de ma faute. C’est aussi bien agréable de toujours me faire dire : « t’es super belle et t’es super fine ». Mais moi aussi, j’ai besoin de pouvoir dire à un homme : « t’es super beau et t’es super fin ».

Le 26 novembre 2003, ma mère a remis toutes les actions qu’elle possédait à cauchemar mais il a dû signer de bons engagements envers elle. À la sortie du palais de justice, je l’ai aperçu derrière nous dans le stationnement et il m’a envoyé un geste de la main… je lui ai crié très fort une grosse insulte pour le tenir à distance et je me suis dirigée avec ma mère le plus vite possible vers mon véhicule.

J’ai crié tellement fort que… si jamais ce jour là, quelqu’un a entendu raisonner à travers toute la ville de Gatineau : « vas chier » … je m’en excuse, car c’était moi.

Le lendemain, cauchemar s’est rendu personnellement dans la boîte postale de ma mère… pour y déposer 2000$ cash.

Non mais… une boîte postale, sur un chemin public, où ça peut partir au vent n’importe quand… ou se faire voler par n’importe qui… et pourquoi? À la cour la veille devant le juge, il venait de dénigrer ma mère en rémission d’un cancer phase 3 ainsi que ma grand-mère maternelle décédée, en plus de ne pas permettre que j’assiste ma mère même avec un papier du médecin, en disant de moi : « c’est elle la responsable de tous les problèmes »… et de se plaindre de devoir faire de la « méditation » à cause de nous toutes. Alors ma mère lui a retourné son argent par courrier certifié en lui écrivant : « mets-toi ça où je pense, médites là-dessus ». C’était très clair : il ne devait s’en tenir qu’aux engagements qu’il avait signés, et nous laisser tranquilles une bonne fois pour toutes.

Le 27 juin 2004, cauchemar s’est présenté à un de mes spectacles d’étudiants. Heureusement, j’avais prévu le coup en prévenant les propriétaires de la salle et il s’est trompé d’heure alors ils lui ont demandé de partir. Une chance que je ne l’ai su qu’à la fin du spectacle.

Cauchemar n’a sûrement pas apprécié que ces gens soient informés de la vérité concernant sa violence. Peu de temps après cela le 29 juillet 2004, il est venu personnellement à ma boite postale me porter un carton sur lequel il m’offrait un cadeau d’environ 20 milles dollars en y ajoutant signé de sa main : « on en parle pas à personne ».

Je n’en reviens toujours pas qu’avec toutes ces preuves tangibles, notre système de justice ne m’ait jamais protégée. C’est à se taper la tête contre les murs.

J’ai faxé une réponse à cauchemar de deux pages, où je lui ai précisé que je n’accepterai jamais aucun cadeau de la part d’un salaud comme lui. Mes avocats au civil et plusieurs policiers “autonomes” m’ont tous demandé sans comprendre; pourquoi je n’avais pas accepté…

Cauchemar peut bien se mette tous ses cadeaux où je pense, car moi : « j’en parlerai plutôt à tout le monde ». Je savais que cauchemar savait… que c’est exactement ça que mon refus signifiait.

En plus, cauchemar avait aussi écrit que ses employés m’installeraient ce cadeau qui « irait bien dans mon salon ». Donc… ses employés « ex-détenus aux prises avec des problèmes de violence en phase de dépression avec qui il entretient une entraide mutuelle »… dans le salon de la « maudite haïssable »??? Non mais… contrairement à ce que bien des gens pensent de moi, non, je ne suis pas folle.

Le 3 mars 2005, je reçois une lettre anonyme extrêmement étrange où il est écrit : « ça fait longtemps que ça dure, ton père se vente depuis longtemps que toi et ta mère vous avez une tête de cochon toutes les deux et qu’il vous a domptées et qu’il compte obtenir autre chose, j’espère que vous avez compris le message ». Je porte plainte une deuxième fois aux policiers : on me conseille de lui envoyer une mise en demeure.

Je détenais pourtant un enregistrement sonore très clair qui prouvait déjà que toutes ces manœuvres étaient du harcèlement criminel, mais aucun policier n’a jamais voulu entendre mon enregistrement. Alors j’ai mandaté immédiatement une avocate au civil. Le 14 mars 2005, j’ai envoyé à cauchemar une mise en demeure pour lui spécifier de ne plus me contacter que par courrier postal ou par fax, un point c’est tout. Pour répondre au 13^e policier enquêteur qui m’a reproché que ce n’est pas encore assez « clair », est-ce qu’il aurait aussi fallut que je dresse une liste de toutes les autres centaines de milliers de manières possibles que peut trouver un fou criminel afin de contacter une victime? Espèce d’imbécile.

Le 16 juin 2005, cauchemar m’appelle encore chez moi malgré cette mise en demeure, à deux reprises dans la même journée. Il me fait des tas de reproches, me disant que tout ce que j’ai c’est grâce à lui, que toute cette merde va me retomber sur le dos… Je n’arrive pas à le croire. Je photographie mon afficheur où il y a clairement le nom de cauchemar d’inscrit.

Je porte plainte immédiatement pour une troisième fois aux policiers, même si leurs paroles sont de plus en plus inacceptables. J’espérais tellement qu’un beau jour, un d’entre eux se décide enfin à faire son travail. Mais en vain.

Le 13 et 14 juillet 2005, cauchemar fait appeler sa secrétaire chez moi, pour toutes sortes de niaiserie pouvant être encore mieux réglées par fax.

Le 25 novembre 2005, cauchemar met personnellement des livres dans ma boîte postale. « Conversation avec Dieu », « Comment trouver son ange gardien » et « Comment méditer », comme pour me narguer de toute la misère qu’il me donne constamment depuis que je suis au monde. J’ai allumé mon foyer avec le premier et jeté les deux autres dans la cours de son commerce pour que ses gros camions les écrasent, tout en lui envoyant un fax sur le sort de ses maudits livres.

Comble de malchance, intrusion de nuit le 11 août 2006 par le pompier “important” et harcèlement criminel. Au moins dans ce cas-ci, des accusations sont rapidement portées contre ce déséquilibré car les deux patrouilleurs de la S.Q. de l’autoroute de Gatineau, contrairement à plusieurs de ma région, savaient vraiment bien lire leur badge.

Le 16 août 2006, je demande à mon médecin de famille de passer des scans au cerveau pour vérifier si je n’aurais pas des lésions suite à tous les coups par la tête que cauchemar m’a donnés. Le deux novembre 2006, je rencontre un neurologue et tout semble normal, car il ne voit rien sur mes scans. Il m’apprend que selon les statistiques, seulement un bébé secoué sur cinq s’en sortirait sans avoir de séquelles physiques. Il remarque des craquements sévères dans mon cou…

Le 2 novembre 2006 vers 6h30 pm, cauchemar envoie un de ses employés chez moi sans prévenir dans mon entrée pendant que j’enseigne, pour me porter stupidement une enveloppe.

Après ma journée de travail, mes nerfs étaient totalement à vif et j’étais encore tellement découragée. Il ne faut pas oublier que depuis toujours, je suis travailleur autonome. Contrairement à cauchemar, je n’ai jamais roulé sur l’or, quoi que je m’en tire plutôt bien. Mais si je tombe malade ou que j’ai besoin de vacances, je dois en assumer les pertes financières et j’ai ensuite des problèmes à payer toutes mes factures. Si vous saviez toutes les fois où j’ai dû canceller des cours car je n’arrivais plus à m’arrêter de pleurer. Par le fait même, j’avais peur de perdre tout ce que j’ai en ayant ensuite du mal à joindre les deux bouts, alors je pleurais encore davantage, en me prenant la tête à deux mains.

Le 14 novembre 2006, je découvre du braconnage par un de ses employés, le mari de sa charmante « contrôleur ». Cauchemar se plaint par fax que je lui interdis de m’appeler.

Le 1^ier mars 2007, cauchemar m’envoie un fax alarmant.

Assez, c’est assez. Je n’en pouvais plus d’être obligée de ramper dans la boue nuit et jour. J’ai immédiatement commencé à préparer toute seule une déclaration contre cauchemar sans aucune assistance des policiers, tout en me fiant sur les conseils de l’agent très professionnel dans la cause du pompier important. Elle contient 7 pages pleines à craquer, 14 pages d’annexes et un CD de preuves sonores, signée du 8 mars 2007.

Le 10 mars 2007, j’ai enfin réussi à remettre ma déclaration à un policier, car j’ai dû tourner en rond pendant quatre jours d’affilés, personne n’étant « disponible » depuis le 7 mars. En effet, j’avais déjà prévu une journée de gros niaisage, mais ils sont encore parvenus à m’épater. J’ai dû appeler au centre de répartition 2 fois, au poste 3 fois, et parler à 5 policiers différents. Service, intégrité, justice, vous dites? Le policier qui a pris ma déclaration m’a encore passé des commentaires complètement fous, en me précisant que j’étais pour rencontrer « beaucoup de problèmes ».

Le 3 mai 2007, cauchemar revient personnellement à ma boite postale.

Le 4 juin 2007, j’envoie un fax au lieutenant de police de ma région, sans aucune réponse. Le 6 juin, je téléphone au poste pour parler au lieutenant et on me passe « le responsable » de mon dossier. L’enquêteur me répète d’aller au civil, me nargue qu’ils ne peuvent pas arrêter tous les criminels dans les rues, m’accuse de ne pas avoir porté plainte quand j’étais enfant et me traite de syndrome de Nathalie Simard. Je pleure et je tente de faire valoir le sérieux de mon dossier. J’enregistre toute la conversation afin de parvenir à comprendre ce qui se passe…

Le 14 juin 2007, cauchemar revient encore personnellement à ma boite postale et mon courrier de marge de crédit est ouvert.

Le 25 juillet 2007, cauchemar m’envoie un fax où il me nargue que ma boite postale est sur un chemin public. Si jamais je lui fais face et que sa voiture se retrouve à bloquer mon entrée privée, est-ce que je devrai le bouler avec ma propre voiture jusque de l’autre côté du beau chemin public?

En été, je recontacte monsieur syndrome. Il me dit avoir passé mon dossier au policier dont je reconnais le nom : celui qui répétait que j’étais folle en 2002. J’ai très peur. J’apprends par hasard le 6 septembre 2007 que ce policier est le beau frère de mon ex-sœur, et ami de cauchemar. Je trouve le courage de retéléphoner au poste le 10 septembre 2007 : l’enquêteur refuse de me donner le nom du procureur de la couronne à deux reprises. J’enregistre tout.

Dès le lendemain, soit le 11 septembre 2007, je contacte le secrétaire de la déontologie policière. Il me confirme que le policier n’aurait pas dû être en charge de mon dossier avec un tel lien de parenté. J’enregistre aussi cette conversation.

Malheureusement, il est déjà trop tard car les policiers ont déjà réussi leur magouille. La couronne refuse ma plainte le 11 septembre 2007, par prescription, même s’il n’y en a pas dans mon cas. La déclaration policière qui accompagne mon dossier était probablement faussée, car la lettre du refus de la couronne est en majeure partie en contradiction avec ma propre déclaration et toutes mes preuves.

Le 12 septembre 2007, je réussis à joindre le lieutenant de police. Il est très compréhensif et m’affirme qu’il va éclaircir tout ça et me retéléphoner. J’attends sans réponse.

Dans tout ce sale charabia, ça ne pouvait pas tomber plus mal : j’apprends le 18 septembre que j’ai des lésions graves aux vertèbres cervicales C-5 et C-6 datant de plusieurs dizaine d’années et la courbe du cou inversée à 113%. Sur le coup, j’ai un gros choc nerveux et j’en tombe presque malade. Mais en peu de temps, je réalise que c’est plutôt une énorme raison pour ne pas lâcher prise.

J’appelle 25 criminalistes pour être informée de mes droits fondamentaux afin d’en trouver une seule qui accepte de me rencontrer. J’apprends le 21 septembre 2007 qu’il n’y a aucune prescription sur la violence aux enfants.

Le 24 septembre 2007, je porte plainte à la déontologie policière.

Le 14 novembre 2007, cauchemar m’écrit par fax qu’il est sous la protection de la faillite et que « vos prières sont exaucées »…

Il me mettait sa faillite sur le dos!!! J’ai immédiatement prévenu ma mère d’être encore plus sur ses gardes chez elle. Je me suis encore enfermée chez moi en barrant toutes mes portes et en sursautant au moindre petit bruit.

Que cauchemar porte bien son nom. Jamais capable de se regarder dans un miroir. Toujours en train de me choisir comme son bouc émissaire. Comme si tous les choix que lui-même a faits depuis le début en me traitant de tous les noms étaient de ma propre faute. Encore de l’amnésie volontaire. Car au lieu de me traiter de « maudite haïssable » en août 2000, il aurait peut-être dû suivre mes petits conseils? Pas assez brillant pour même y songer un brin.

Par crainte de représailles, je n’ai jamais fait aucun reproche à cauchemar en lui disant que tout ça était de sa propre faute, mais je lui ai tout de même répondu par fax de s’acheter un punching bag, en espérant qu’il me laisse enfin tranquille. Entretemps, j’ai lu dans les journaux qu’il espérait obtenir une autre subvention d’investissement Québec afin de s’en sortir.

Le 18 novembre 2007, j’ai contacté le procureur en chef de Hull. Un “complément d’enquête” a été accepté!!!

Complètement par hasard, j’ai su le 23 novembre 2007 que cauchemar avait mis une hypothèque illégale de un demi million sur mon terrain le 16 octobre 2002. J’avais toujours un mauvais pressentiment alors j’avais précédemment demandé à mon notaire de vérifier mais il me répétait toujours que c’était « impossible ». Cette journée là, j’ai insisté. Mon notaire ne parlait plus au bout de la ligne, alors j’ai vite compris. Je me suis donc retrouvée à parler au grand patron d’investissement Québec, qui m’a alors demandé tous les documents en preuves. Le charmant monsieur n’en revenait pas de constater que la signature de cauchemar ne valait absolument rien. Je lui ai demandé comment ils pouvaient hypothéquer des biens sans faire de meilleurs vérifications que ça en jouant avec l’argent des contribuables? Ils font confiance aux notaires des compagnies semble-t-il. Tout de même, investissement Québec ont bel et bien une excellente notaire, car c’est elle qui m’a aidée à retirer cette hypothèque illégale de mon dos, et quelques centaines de dollars ont suffit pour que mon propre notaire finalise cette folle histoire.

Mais toute cette malhonnêteté de cauchemar a fait en sorte qu’il a bel et bien fait une faillite commerciale de 10 millions le 21 décembre 2007 ainsi qu’une faillite personnelle de un million le 1^ier avril 2008.

Je suis certaine que si cauchemar apprend que j’ai eu à parler au patron d’investissement Québec peu de temps avant cela, il va encore m’en vouloir à mort, bien sûr, lui qui m’accusait même de « prières »… La vérité, c’est qu’il s’est tiré lui-même dans le pied, tellement c’est un malade. Mais cauchemar refusera toujours d’admettre la gravité de ses erreurs et sa malhonnêteté, car son orgueil n’a aucunes limites.

La preuve que cauchemar avait un bon ami au poste de police de ma région : quelques mois après que j’aie porté plainte à la déontologie policière et au procureur en chef, j’ai enfin obtenu un bon répit.

Dans toute cette misère, je suis certaine que mes plaintes aux policiers nous ont tout de même sauvé la vie à ma mère et moi, car les quatre fois où j’ai porté plainte, j’envoyais toujours immédiatement à sa compagnie les numéros de dossier pour le prévenir de se tenir tranquile. Cauchemar et sa complice contrôleur savaient dès lors que les policiers étaient déjà informés de leurs manigances et s’ils avaient mis leurs menaces à exécution, ils auraient été les premiers soupçonnés.

J’espère qu’avec du sang, les enquêteurs auraient enfin décidé de bien faire leur travail. Mais je ne peux pas m’empêcher d’avoir un sérieux doute… alors avec tous ces écrits, peut-être qu’enfin je deviens un peu en sécurité?

D’un autre côté, je sais que cauchemar ne veut pas que je parle et qu’il est totalement déséquilibré. Je suis certaine que ça peut le fâcher au point qu’il revienne chez moi sans avertissement. Il en est capable.

Si jamais ça se produit, qu’est-ce que ça me donnerait d’appeler encore les policiers? Ils ont été son complice, et tout notre système de justice aussi. Aucunes accusations n’ont été portées contre lui à ce jour. Alors je devrai lui régler son cas toute seule?

Je ne peux pas m’empêcher de rêver que si les policiers m’avaient soutenue dès le départ, je ne serais pas là encore aujourd’hui à écrire des centaines de pages et devoir revivre toutes ces saletés depuis maintenant 45 années. J’en veux beaucoup à tous ces gens malhonnêtes ainsi qu’à notre système judiciaire qui permet de tels dérapages. J’ai constamment des flash-back de tout ce que notre système de justice m’a fait endurer et c’est tellement injuste de devoir ajouter ce fardeau là à toutes mes autres peines. Même la couronne a choisi de prendre la défense d’un criminel. Je ne comprends pas toute cette misère inhumaine et je désire me battre pour que cela n’arrive plus jamais à personne d’autre.

Je pense cependant que tout comme Hitler, cauchemar a usé de son intelligence et de son pouvoir de grand manipulateur pour réussir à convaincre beaucoup de gens de le suivre. Il suffit de convaincre une personne. Ensuite, chacun couvre les erreurs de l’autre avant lui, et ainsi de suite. Personne n’a eu le courage de se lever debout à un moment donné pour prendre ma défense. Personne.

Cauchemar s’est ensuite attaqué à moi au niveau civil pour reprendre sa vengeance quelque part à cause de mes “prières”… Il m’a informée par fax qu’il ne respecterait plus aucun engagement qu’il a signé envers ma mère le 23 novembre 2003. Ensuite, il m’a écrit par l’entremise de ses avocats que c’est à moi de faire vivre ma mère et qu’il ne lui donnerait pas de pension alimentaire comme les papiers le stipulent. Ma mère et moi avons évalué encore les coûts : elle en était déjà rendue à 45 milles de frais d’avocats.

Le problème avec un déséquilibré, c’est que peu importe ce qu’il signe, il peut ensuite ne pas le respecter, alors à quoi bon? Mon avocat a quand même porté plainte pour ses outrages à la cour, mais un juge a eu pitié de cauchemar à cause de sa faillite. Tsss… ça ne m’étonne même pas. Notre système de justice actuel encourage les investisseurs à ne pas savoir compter et à faire porter le poids de leurs incompétences sur le dos des plus petits qu’eux. Rien n’a de sens moral pour eux. Rien.

Puis je me suis retrouvée avec le ministère de l’environnement sur le dos, car cauchemar a refusé de produire la caractérisation du terrain comme son bail le stipulait, et c’est moi qui devrai payer tout ça. Il m’avait même signé auparavant à ce sujet des papiers à son nom personnel. Il m’a ensuite répondu par fax qu’il avait fait « son possible », en citant une histoire stupide d’arbres qui poussent sur du béton… comme pour me narguer encore et encore…

Admettons que grâce à cauchemar, je n’ai jamais eu les moyens de me payer des massages pour soulager un peu la douleur de mon cou, ni de prendre de belles vacances bien méritées, ni d’embarquer dans un avion une seule fois, et que ce n’est pas non plus demain que je les aurai.

LE SUMMUM

Lorsque j’ai rencontré le 13e policer “autonome” le 29 août 2008 pour le “complément d’enquête” d’une enquête qui n’avait pourtant jamais “débuté”, j’ai tout de même espéré que la vérité éclate enfin au grand jour. Malgré toutes les stupidités dites par le sergent enquêteur (voir chapitre XIII dédié aux “autonomes”), je savais que cauchemar serait au moins enfin interrogé et je croyais qu’il ne pourrait rien nier à cause de toutes mes preuves en béton. Je conservais aussi un léger espoir sur le fait qu’il admettrait ses crimes, car peut-être avait-il un meilleur fond que je ne le pensais?

Mais non, je le juge sévèrement avec raison. Il s’est encore faufilé comme un serpent, en osant même dire: “ça me donnerait quoi que j’avoue tout ça, elle ne me reparlera jamais de toute façon”. À quel point faut-il être tordu et monstrueux pour s’imaginer qu’en échange de la vérité, la victime qu’on a handicapée pour le reste de sa vie, doit quelque chose en retour à son agresseur?

Un vrai psychopathe!!! Sur l’échelle de Robert Hare « pcl-r », même en omettant de répondre aux questions ambiguës, cauchemar arrive à 35 sur 40…

À partir de ma naissance, cauchemar a gâché toute mon enfance, en se permettant de m’agresser jusqu’à mes 19 ans. Ensuite dès l’âge de 20 ans, je plonge dans l’enfer des tentatives de suicide. Fin de mes 33 ans, il ose venir me menacer chez moi. Pour couronner le tout, il corrompt des policiers, comme pour massacrer le reste de mon existence…

POURQUOI À MES 17 ANS, CAUCHEMAR M’A-T-IL AVOUÉ QU’IL M’A SECOUÉ À UN MOIS AVEC ARRÊT RESPIRATOIRE???

POURQUOI M’A-T-IL MIS LE POID DE SA TENTATIVE DE MEURTRE ENVERS MOI… SUR MON DOS À MOI???

Pour ensuite me faire passer pour une folle… et tout nier…

Si au moins l’enquêteur avait accepté de mettre sous les yeux de cauchemar la lettre à laquelle il fait lui-même référence à deux reprises sur l’enregistrement sonore. C’est écrit noir sur blanc: “TU ME BATTAIS BÉBÉ NAISSANT”, et non pas : “tu secouais ma couchette” !!! Comment l’enquêteur a-t-il pu refuser cette preuve tangible ainsi que plusieurs autres tout aussi importantes et accepter de se laisser berner ainsi par un fou criminel? Je ne peux pas me résigner à croire qu’au Québec, il n’existe pas un seul enquêteur digne de ce nom là qui aurait la conscience morale pour pousser ma cause aussi loin qu’elle mérite d’être poussée.

Ça peut sembler fou, mais si je pouvais assister à l’interrogatoire de cauchemar en présence de policiers pour me protéger, moi je serais capable de confronter cauchemar directement et comme je connais tout la vérité dans les moindres détails et toutes les manigances de ce monstre, je suis certaine que je pourrais réussir à obtenir tous les aveux nécessaires. En ma présence, cauchemar me nargue toujours mais lorsque je le regarde droit dans les yeux, il se met instantanément à fuir mon regard et viser le tapis, ensuite il se fâche et perd son masque. Comme je serais bien entourée par des policiers, je n’aurais pas peur de me faire encore arracher la tête. Ce ne seraient pas de beaux moments à vivre bien sûr, mais au nom de la cause des enfants battus, il n’y a rien que je ne ferais pas.

Je serais même prête à confronter cauchemar devant un juge à la cour et lui faire subir l’interrogatoire de sa vie. En même temps au palais de justice, ça aiderait peut-être à faire ressortir la tête bien enfoncée de quelques autruches? Mais je ne sais même pas si tout cela est permis par notre système judiciaire afin d’obtenir toute la vérité, puisque la majorité du temps, on agit comme si les victimes étaient déjà mortes et enterrées, en se foutant complètement de ce qu’elles ont à dire, de ce qu’elles ressentent, de leurs droits fondamentaux et de leur droit de vivre.

J’ai appris en septembre 2012 que je ne suis même pas “la cliente” de la couronne, donc… la cliente de personne (chapitre VIII, la couronne de la reine).

REVIVRE

Pour conclure, je pense que bien des hommes et des femmes et malheureusement aussi des enfants, qui ont songé ou songent présentement au suicide (ou même qui sont décédées), sont infiniment sensibles et extrêmement conscients de la fragilité humaine et que si toutes ces personnes meurent, le monde perdra chaque fois un peu plus… de sa sensibilité et de son humanité. Alors malgré tout, il faut au moins tenter de toujours se relever, même si ça ne se fait pas toujours instantanément à cause de tout le poids qu’on a sur les épaules.

À noël 2011, un ami m’a offert le livre de Martine Ayotte : La proie. J’en conseille fortement la lecture aux victimes d’actes criminels, car cette femme a fait preuve d’un courage indescriptible. Elle a été victime d’un père abominable et elle a trouvé le courage de porter plainte contre lui lorsqu’elle avait environ 40 ans. Ce qui est extrêmement encourageant dans son cas, c’est que même en ayant que sa parole, sans preuve sonore, sans témoin, même si toute sa famille a témoigné contre elle et même sa mère, elle a reçu immédiatement l’aide des policiers et de la couronne et le criminel a ainsi attrapé sept ans de détention. On y apprend aussi qu’une intervenante du CAVAC (centre d’aide aux victimes d’actes criminels) l’a accompagnée tout au long de son parcours et même avant de porter plainte, tout en étant aussi présente lors de sa déposition policière. Les coordonnées du CAVAC sont : 1-866 LE CAVAC, 1-866-532-2822, www.cavac.qc.ca.

Cela me confirme encore une fois que tout ce que cauchemar ainsi que notre système de justice m’ont fait vivre, ce n’est vraiment pas normal. Ils avaient pourtant mon témoignage, celui de ma mère, ma preuve sonore, mes lésions physiques ainsi que des preuves matérielles. Au bout de quelques mois qui ont suivi la plainte de Martine, le criminel a été menotté et sous caution, avec des engagements à se tenir à distance d’elle. C’est bien la preuve que notre système de justice a les moyens d’agir mais que dans mon cas, la volonté n’y était pas.

J’ose croire qu’il y a des solutions à toute chose. Il faut peut-être parfois creuser bien plus loin qu’en chine… mais puisqu’on a concrètement réussi à voyager jusqu’à la lune, ce qui semblait pourtant impossible au départ… on peut sûrement aussi réussir à voyager… au plus profond de nous-mêmes, quitte à s’inventer un monde parfait à l’intérieur de nous, bien à l’abris de tout ce qui est dangereusement imparfait à l’extérieur.

Je répète qu’il existe heureusement des centres accessibles à tous, 24 heures sur 24, pour trouver un peu d’écoute si notre goût de vivre commence à disparaître. Ma référence pour l’Outaouais est le centre 24/7 (819-595-9999). Ailleurs au Québec, on peut facilement trouver tous les liens internet en tapant simplement « suicide secours ». Lorsqu’on est suicidaire et seulement si on le désire, ils sont également en mesure de transférer notre dossier au CLSC de notre région. Un suivi s’établit alors et en quelques mois, un psychologue nous rencontre gratuitement.

Pour retrouver le sens de notre vie lorsque les difficultés nous semblent insurmontables, je crois cependant qu’il ne faut pas mettre tous nos œufs dans le même panier. Un peu de thérapie par ci, un peu de gros bon sens par là. J’ai suivi personnellement une dizaine de séances afin de poser plusieurs questions et obtenir plusieurs outils. Mais il ne faut jamais oublier que personne n’est infaillible, pas même les médecins du corps… ni de l’esprit ou de l’âme.

Car la détresse humaine attire aussi beaucoup son lot de charlatans. Il faut avant toute chose croire en nous même et ne jamais abandonner tout notre pouvoir à une unique personne, tout en demeurant très ouvert d’esprit. Il faut apprendre à refuser catégoriquement tout ce qui peut mettre notre vie en danger, surtout tous les « blabla » de gourous, de sectes et de religions.

Ma mère est en rémission d’un cancer phase trois depuis maintenant presque vingt ans et je suis très fière du courage qu’elle démontre. Elle s’est également excusée auprès de moi pour plusieurs choses que je lui ai vivement reprochées car cela mettait régulièrement ma vie en péril. Ses habitudes de sainte martyre et sa mollesse ne sont pas des bons choix de vie, alors je refuse qu’elle me les impose, peu en importe la raison. Sa nouvelle rengaine : « personne ne me fera mourir ». Cela prouve qu’il n’y a pas d’âge pour se prendre enfin en main. Puis je la remercie d’avoir accepté que je dévoile toutes ces choses car je lui ai demandé de lire tout ça et elle a bien vu qu’à certains moments, je ne la ménage pas. Mais elle m’a répondue : « tout est vrai, alors publie-le, et si jamais ça peut aider d’autres personnes, alors tant mieux. »

Un bon moyen pour retrouver le goût de vivre, qui est mon « petit truc à moi » mais vieux comme le monde… c’est de rêver. Tous les cinéastes de cette planète ne rivaliseront jamais avec les plus beaux films grandioses qui se retrouvent… dans ma petite tête. Ça ne me coûte absolument rien… et ça m’est accessible en tout temps!

Je peux tout de même vous faire part d’un de mes plus beau rêve… c’est qu’il y ait un jour un centre pour les enfants abandonnés ou maltraités. Je prends chaque semaine un billet pour gagner les 50 millions de la loto afin de permettre à ce rêve de rester bien en vie. Au Québec à l’heure actuelle, les centres de protection de la jeunesse sont débordés et il n’y a pas suffisamment de familles d’accueil. Je suis en contact avec quelques jeunes élèves qui me racontent leurs histoires de vie et j’en suis profondément blessée. Le nom de ce centre serait « Aurore », en mémoire de cette jeune fille morte dans les pires atrocités, ignorée, torturée, maltraitée et totalement seule. Il y aurait des chambres privées assez grandes, bureau d’étude, ordinateur (sous contrôle), salle de bain-douche, et petit balcon extérieur. Aussi une méga bibliothèque centrale, un salon avec cinéma, un décor chaleureux, et le plus essentiel… de l’écoute humaine choisie sur le volet ainsi qu’un encadrement idéal, 24 heures sur 24. C’est à dire des psychologues spécialisés, des enseignants engagés tous les soirs et week-end pour aider les études des jeunes, des gardiens de sécurité, et des bonnes caméras de surveillance. Tout pour compenser leur malchance et leur redonner ce à quoi ils avaient droit eux aussi, dès leur naissance.

Une partie « des 50 millions que je vais gagner »… serait également destinée à sensibiliser la population sur le problème de la violence faite aux enfants ainsi que sur la planification des naissances avec des publicités efficaces. Ça viendrait ainsi contrebalancer pour toutes les absurdités que les papes véhiculent à ce sujet depuis des siècles et des siècles, amen.

Un autre truc pour réussir à survivre et qui est lui aussi vieux comme le monde… est tout simplement de se permettre de pleurer. Cela m’est même arrivé devant certains policiers récalcitrants et aussi directement à la cour lors d’interrogatoires insensés sans que je ne puisse rien y contrôler : un véritable état de choc, parfois même à en perdre le souffle. Oui, c’est très humiliant, mais je répète qu’il n’y a pas de honte à ressentir des émotions humaines, qu’il n’y a que les êtres inhumains qui n’en ressentent pas et que moi… je préfère de loin ne jamais leur ressembler.

Par contre, je me suis déjà retrouvée vers 2003 avec des brûlures sous les yeux à force de pleurer comme le déluge. Non, ce n’était pas la joie… mais j’ai toujours continué à refuser de prendre toutes les belles « pilules » que ma thérapeute me proposait. C’est peut-être une erreur de ma part et suis-je trop têtue? Mais je préférais avoir la peau en feu et des yeux de grenouilles plutôt que de ne plus ressentir mes émotions et risquer d’être trop lente à trouver des solutions dans ma bataille contre cauchemar. Il n’y avait pas non plus de crème efficace même si j’ai rencontré une dermatologue qui n’a rien pu y faire. Alors j’ai plutôt choisi de ne pas être belle… que de fuir la réalité.

Et puis peu à peu les immenses déluges de larmes ont diminué… et mon sourire est réapparu… et mes yeux de crapaud ont eux aussi disparus… du moins je le pense?

Pour terminer, lorsque je me sens encore déboussolée, je me répète sans cesse que j’ai eu infiniment de chance malgré tout puisque comparé à bien d’autres, je suis toujours en vie. Et comme on a voulu me tuer dès ma naissance pour m’empêcher de pleurer, il y a en moi comme une rage incessante qui me dicte de ne pas me taire chaque fois qu’on s’y emploie contre mon gré.

J’avoue que les séquelles physiques que j’ai ne me remontent pas le moral… puisque grâce à cauchemar, mon larynx accroche dans mes vertèbres cervicales 5 et 6, à chaque fois que j’avale. Et c’est incroyable le nombre de fois qu’on peut avaler en une journée… Ça irrite aussi l’œsophage, alors j’ai la sensation de devoir avaler sans arrêt et je m’étouffe souvent. Ça devient parfois insupportable car je déteste vraiment ce bruit dans ma gorge qui produit un gros « crounche », tout en me faisant revivre de très horribles flash-back. Et puis à la longue, il y a des chances que mon larynx se déplace aussi… À certains moments, je ne me sens plus bonne à rien, juste à jeter dans une poubelle car je suis trop brisée.

Mais… il y a tellement d’endroits sur cette planète où on entend des bruits encore bien pires que celui là… des missiles qui tombent sur des maisons… des bombes qui explosent aux quatre coins des rues… où les droits humains fondamentaux sont totalement bafoués et où aucun système n’est en place pour qu’on perçoive même un semblant de justice humaine. Alors il me semble que comme j’ai la chance d’être au moins née dans un des pays les plus « riches » de la planète, où la liberté d’expression est fortement permise et encouragée, je vous assure que je n’ai pas encore dit mon dernier mot malgré tout…

Je souhaite du fond du cœur à toutes les personnes qui souffrent de trouver près d’elles des réponses qui leurs offriront des solutions pour apaiser rapidement leurs peines. N’oubliez jamais que tout ce qui existe d’humainement beau sur cette terre a d’abord été créé par une simple pensée, une idée, ou un petit geste. Puis l’univers qui nous entoure semble si grand et infini que c’est pratiquement impossible qu’il ne contienne que des laideurs mortelles…

J’aimerais que vous puissiez découvrir rapidement sur votre route une petite ou une grande chose qui vous permettra de vous accrocher de nouveau à la vie, ainsi que beaucoup de compréhension et de véritable amour. Je me le souhaite aussi.

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